Blanche comme le lait, rouge comme le sang est un roman d'Alessandro d'Avenia paru au Livre de poche le 3 janvier 2013 (288 pages, 6,60 €, ISBN 978-2-253164593). Bianca come il latte, rossa come il sangue (2010) est traduit de l'italien par Nathalie Bauer.
Alessandro d'Avenia est né le 2 mai 1977 à Palerme (Italie). Il est docteur en lettres classiques, enseignant de littérature italienne dans un lycée de Milan, romancier et scénariste.
Bianca come il latte, rossa come il sangue est son premier roman. Cose che nessuno sa a suivi en 2011.
Plus d'infos sur http://www.profduepuntozero.it/ en italien évidemment !
Je remercie Éléonore et Le livre de poche de m'avoir envoyé ce roman. Je l'ai sélectionné parmi six romans parce que le titre me plaisait et que c'est un premier roman.
« Tout a une couleur. Chaque émotion a une couleur. Le silence est blanc. De fait, le blanc est une couleur que je ne supporte pas. » (page 11). Voici comment débute ce roman.
Leo a 16 ans. Il s'ennuie avec ses parents, son chien (Terminator, un vieux basset), au lycée... Heureusement il a son scooter qui lui permet d'être autonome, son iPod pour écouter de la musique et son ordinateur pour se sentir moins seul. Il a quand même un meilleur copain, Niko, avec qui il joue de la guitare et aussi au foot ; une copine, Silvia, pas une petite copine, une amie, une vraie amie parce qu'elle est bleue. Et puis Beatrice, son amour secret. « Des yeux verts qui dévorent le visage. Des cheveux roux qui, une fois dénoués, vous jettent l'aube au nez. Des mots rares mais justes. […] Une couleur ? Béatrice est rouge. De même que l'amour est rouge. […]. » (page 12).
Vous comprenez un peu mieux le titre, qui est tiré du conte L'amour des trois grenades, d'Italo Calvino dans Contes populaires italiens (1982).
Un jour, Madame Argentieri, la prof d'histoire et de philo est absente (son mari a un cancer). « Il y aura une remplaçante. Une minable comme d'habitude. » et « On l'attendait au tournant, la remplaçante, aussi laide que la morte dans son impeccable tenue violette […]. » (page 20).
La remplaçante est en fait un remplaçant complètement différent de ce que Leo pensait. « Mais voilà qu'entre un type jeune. Veste et chemise. Net. Des yeux trop noirs à mon goût. Des lunettes également noires sur un nez trop long. Un sac bourré de bouquins. Il répète qu'il aime son métier. Il ne manquait plus que ça. Les types qui y croient sont les pires ! » (page 21).
Leo surnomme ce professeur Le Rêveur mais le jeune professeur de 30 ans va faire fi des moqueries et des provocations et insuffler à ses élèves les notions de rêves, de liberté, de volonté de changer et d'être soi-même. « La philosophie est le silence dans lequel ces rêves naissent. […] Quand ils ne naissent pas du silence, les rêves se transforment en cauchemars. » (pages 25-26). Voilà une utilité au blanc, au silence !
Comme le mari de Madame Argentieri est mort, celle-ci a décidé de se mettre en pré-retraite. Ainsi le jeune professeur reste.
Et petit à petit, Leo découvre son rêve, les différentes pièces du puzzle se révèlent à lui, mais pas sans qu'il ne fasse rien, parce qu'il réfléchit, parce qu'il y pense, parce qu'il en veut !
Je me suis attachée à Leo, adolescent romantique à la crinière de lion, et lyrique avec ses mots à lui, non dénué d'humour et de poésie, mais qui baisse vite les bras. « La poésie, c'est une connerie en rime. Dante, va te faire foutre ! » (page 51).
Le roman décrit de façon imagée (et colorée !) non seulement la vie des ados, leurs idées, leurs relations entre eux, mais aussi les relations qu'ils ont avec leurs parents et les professeurs. Et il faut vraiment sortir du lot pour être un adulte qui inspire le respect à ces jeunes.
Il n'y a pas que de l'amour et du rêve dans ce roman, il y a aussi l'hôpital, la maladie, la mort, des sujets plus graves qui font souffrir et se poser des questions sur le sens de la vie. Il y a aussi la pensée, la réflexion, encaisser, comprendre, mûrir.
Ainsi cette lecture n'est pas destinée exclusivement aux adolescents : sa richesse et son ton plairont assurément aussi aux adultes.
Et je veux encore remercier Éléonore et Le livre de poche car je n'aurais peut-être jamais repéré ce livre (paru aux éditions Jean-Claude Lattès en octobre 2011) alors qu'il m'a vraiment émue et enthousiasmée, au point que je le mets en coup de cœur.
Quelques extraits
« L'histoire, comme la philosophie, l'art, la musique et la lecture, est la meilleure façon de découvrir la nature humaine. » (page 26, phrase du professeur).
« Quand on est amoureux, le temps ne devrait pas exister. Mais ma mère existe, elle n'est pas amoureuse de Béatrice et elle est furieuse : elle ignorait où j'étais. Qu'est-ce que j'y peux ? C'est l'amour. Les moments rouges de ma vie sont ainsi : sans montre. » (page 38).
« Je n'ai jamais pensé que les bouquins pouvaient changer quoi que ce soit, encore moins dans la vie. Ou plutôt, ils transforment ta vie parce que tu es obligé de les lire alors que tu voudrais faire autre chose. » (page 48).
« Je n'ai rien à dire : sans amour, les mots n'existent pas. Les pages sont blanches, la vie n'a plus d'encre. » (page 60).
« La bonne blague ! Il faut demander une autorisation pour donner son sang à un malade. Il faut demander l'autorisation pour bâtir un rêve, ou le sauver. Quel monde de merde ! On te pousse à rêver puis on t'en empêche quand tu as commencé : les gens sont tous envieux. » (page 68).
« Quand tu n'as pas de rêves, tu les voles aux autres pour les empêcher d'en avoir. La jalousie te crame le cœur et ce feu détruit tout... » (page 78).
« Je suis fier de toi, Leo. De ce que tu as fait. […] Aujourd'hui tu as agi en homme, parce que tu as fait une chose que personne ne t'a soufflée ou n'a décidée pour toi. C'est toi qui l'a choisie. » (pages 87-88, phrases du père de Leo).
« Un beau jour, on se regarde dans la glace et on se trouve différent. Oui, parce que la glace est la forme de vérité la plus cruelle. On n'apparaît pas tel qu'on est vraiment. On aimerait que son image corresponde à ce qu'on ressent et que les autres puissent voir immédiatement qu'on est sincère, généreux, sympa... » (page 127).
Je m'arrête là mais j'aurais pu en citer plein d'autres !
Un très beau roman pour les challenges Cartable et tableau noir (une grosse partie du récit se passe au lycée, en particulier en cours de philo mais pas que), Jeunesse & young adult # 2, Petit Bac 2013 (catégorie partie du corps humain), Premier roman, Voisins Voisines 2013 et Tour du monde en 8 ans (Italie), et bien sûr Il viaggio. | |||
commenter cet article …