Churchill à Yalta : la Pologne trahie est un roman de Michael Dobbs paru aux éditions ZdL le 26 mai 2011 (360 pages, 21,90 €, ISBN 978-2-9538791-0-0). Churchill's triumph (2005) est traduit de l'anglais par Lucie Delplanque.
Je remercie Gilles Paris de m'avoir envoyé ce roman historique qui m'a passionnée et enthousiasmée.
Quelques mots sur les éditions ZdL
Zofia de Lannurien est née en Pologne ; elle vit en France depuis les années 70 ; elle crée maintenant une maison d'éditions pour faire mieux connaître la Pologne et l'Europe de l'Est.
Churchill à Yalta : la Pologne trahie, de Michael Dobbs est le premier livre des éditions ZdL (j'aime beaucoup la couverture).
Le labyrinthe de Poutine : la face obscure de la nouvelle Russie, de Steve Levine et Les 100 ans à venir : un scénario pour le XXIe siècle, de George Friedman sont annoncés pour l'automne 2011.
Plus d'infos sur Zofia de Lannurien éditions.
Michael Dobbs est né le 14 novembre 1948 à Cheshunt en Angleterre. Après un doctorat en études de défense nucléaire en 1971, il est devenu journaliste aux États-Unis. Puis, de retour en Angleterre, il s'est engagé en politique, jusqu'en 1995. Son premier roman, House of cards (le premier tome d'une trilogie politique historique) est paru en 1989. Il est passionné par Churchill et lui a consacré cinq romans, dont Churchill à Yalta : la Pologne trahie, qui a reçu le prix Benjamin Franklin du meilleur roman historique en 2008. En février de cette année, il est devenu Lord Dobbs de Wylye à la Chambre des Lords.
Plus d'infos sur son site officiel.
Juin 1963. Sur le Christina, yacht d'Aristote Onassis, au large de Corfou, Winston Churchill se retrouve face à un serveur polonais qu'il a rencontré il y a près de 20 ans.
Février 1945. Staline refusant de sortir de l'Union Soviétique, il a invité Churchill et Roosevelt à Yalta, en Crimée.
« La ville n'était plus qu'une terre de souvenirs, ce qui rendait encore plus incroyable qu'elle eût été choisie pour accueillir la conférence la plus importante de la guerre. » (page 49).
Les trois hommes les plus puissants du monde, surnommés La Sainte Trinité, sont des vieillards malades et épuisés par la guerre...
Winston Churchill a déjà 70 ans ; il voyage avec sa fille (Sarah Oliver), son valet (Frank Sawyers), son ministre des Affaires étrangères (Anthony Eden), son sous-secrétaire d'État (Sir Alexander Cadogan) entre autres. La délégation anglaise est logée au palais Vorontsov.
Franklin Roosevelt a 63 ans, mais il est en fauteuil roulant (il mourra deux mois après la conférence de Yalta) ; il voyage avec sa fille, Anna Boettiger et ses conseillers. La délégation américaine est logée au Livadia, l'ancien palais d'été du tsar.
Joseph Staline, à 65 ans, est en forme et supporte encore bien l'alcool. La délégation russe est accompagnée de nombreux employés, comme Marian Nowak et ses collègues du Metropol, grand hôtel de Moscou, réquisitionnés et transférés par le NKVD. Ils logent au palais Youssoupov de Koreïz.
« Le monde soviétique était un édifice d'improbabilités, dans lequel il n'existait aucune ligne droite ni aucun bon sens. » (page 96).
Marian Nowak – qui se fait passer pour un plombier – demande de l'aide à Sawyers car il est en danger : il est en fait le comte Tadeusz Raczynski, lieutenant du 14e Uhlan (le meilleur régiment de Cavalerie de Pologne) et il a des informations sur le massacre de Katyń car il était parmi les officiers prisonniers mais il a pu s'échapper.
« C'était un crime aux proportions extraordinaires ; un crime contre les Polonais – tous les Polonais, le monde s'accordait sur ce point. Le reste, en revanche, n'était qu'un fatras d'accusations et de soupçons. » (page 54).
Évidemment le NKVD espionne les délégations britannique et américaine (surveillance, écoutes, personnel de maison qui ne frappe pas aux portes avant d'entrer). Staline mène la danse. Roosevelt, qui veut que Staline entre en guerre avec lui contre le Japon, lui accorde tout et exige la reddition sans condition de l'Allemagne en totale méconnaissance de la culture et de la courtoisie européennes. Surtout Roosevelt et Staline se rencontrent pour des accords et des protocoles secrets. Churchill montre sa désapprobation en faisant des discours mais il se sait trahi par ses deux alliés, lui ainsi que l'empire britannique, et aussi la Pologne et les Chinois...
Churchill à sa fille, Sarah : « Vois-tu, nous sommes trois autour de cette table : l'ours, le bison et l'âne. Mais seul ce bon vieil âne sait comment rentrer chez lui. » (page 139).
« À quoi bon écrire un roman sur des événements historiques ? Comment cela pourrait-il enrichir une mer sur laquelle tant d'historiens ont déjà navigué ? » (page13, préface de l'auteur).
Un roman ? Pourtant ce que je viens de lire est un récit précis de ce qui s'est déroulé durant ces huit jours à Yalta ! Et j'en ai été scotchée ! Quoi, le personnage de Marian Nowak et la ville de Porun sont des inventions de l'auteur ? Mais ils représentent à eux seuls les Polonais et les villes de Pologne ! Bon, d'accord, ce roman historique est en partie une fiction mais il m'a appris tant de choses sur Churchill et les Anglais, Roosevelt et les Américains, Staline et les Russes, sur le partage du monde tel que l'ont décidé Roosevelt et Staline que je ne peux le considérer que comme un grand livre d'Histoire ! Que je vous conseille bien sûr absolument !
Churchill a des défauts mais il est un « grand homme » qui aime la liberté et j'ai aimé ses pensées sur Staline (pages 61 et 63) et aussi les pensées de Roosevelt sur l'Europe (pages 76-77) : trop long pour noter un extrait, à vous de les découvrir ! Mais voici un dialogue édifiant, durant le dernier repas à Yalta, entre Churchill et Staline : « – Dites-moi, maréchal... Que se passe-t-il en Russie lorsqu'un politicien est viré ? […] – Eh bien, ils disparaissent, marmonna Staline […]. Ils se retirent de la vie publique. » (page 288). Quel doux euphémisme !
Quant au Général de Gaulle, il n'était pas invité car Roosevelt et Staline ne l'aimaient pas, et puis la France vaincue avait été occupée, avait collaboré et n'avait pas été capable de se libérer toute seule, elle était donc méprisée, au même titre que la Pologne : « Ils ont perdu. Incapables de défendre leur pays, puis de le libérer. Ils devront donc se contenter de ce qu'ils trouvent. » (Staline, page 172).
Après la conférence de Yalta, l'Organisation des Nations Unies (chère à Roosevelt) devait mettre fin à toutes les guerres... « Belles paroles, nobles aspirations. » (page 118).
« […] la guerre ne s'achève pas simplement le jour où les balles cessent de siffler. La lutte pour la liberté est sans fin. Elle se poursuit, tant que la tyrannie est debout et que des hommes souffrent. » (page 346). Je voulais conclure avec ces mots de Churchill qui sont encore tellement vrais !
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