Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage est un roman de Maya Angelou paru aux éditions Les Allusifs en novembre 2008 (312 pages, 24 €, ISBN 978-2-922868-82-1) mais j'ai lu la version poche parue en octobre 2009 aux éditions Le Livre de Poche (6,50 €, ISBN 978-2-253-12753-6).
I know why the caged birds sing (1969) est traduit de l'américain par Christiane Besse.
Je remercie Suzanne de Chez les Filles et Le Livre de Poche de m'avoir envoyé ce beau classique de la littérature noire américaine des années 60 et je vais d'ailleurs l'intégrer dans le défi littéraire 100 ans de littérature américaine.
Marguerite et Bailey Johnson ont 3 et 4 ans lorsque leurs parents se séparent et que leur père les envoie dans la ville de Stamps où leur grand-mère, Annie Henderson, tient le Magasin général de marchandises avec son fils estropié, William Johnson, oncle Willie pour les enfants. Ils quittent donc Long Beach en Californie, c'est-à-dire le nord-ouest du pays, et se retrouvent des milliers de kilomètres plus loin en Arkansas, au sud-est dans un état où sévit la ségrégation.
« À Stamps, la ségrégation était si totale que la plupart des enfants noirs ne savaient pas, en vérité, à quoi ressemblaient exactement les Blancs. Excepté qu'ils étaient différents, et qu'il fallait avoir peur d'eux, et cette peur traduisait aussi l'hostilité des faibles contre les puissants, des pauvres contre les riches, des travailleurs contre les patrons et des mal habillés contre les bien vêtus. » (page 37).
Marguerite est « grande, gauche et rugueuse [...] couleur caca [...] cheveux hérissés sur (sa) tête en paille de fer » alors que Bailey est « petit, gracieux et lisse [...] peau de velours noir [...] boucles brunes. » (page 33).
Marguerite est devenue Maya parce que son frère l'appelait tout le temps My Sister, comme s'il disait Maï Sister, et le Maï s'est transformé en Maya.
Cinq ans après, alors que les enfants croient leurs parents morts, leur père qui « était d'une beauté éblouissante » (page 70) arrive à Stamps dans une belle voiture puis les emmènent à Saint-Louis chez leur mère. Là, Marguerite et Bailey apprennent que leur grand-mère maternelle est une Blanche, une Allemande mariée à un Noir. Mais après que M. Freeman le nouveau mari de leur mère ait abusé de Marguerite (elle a 8 ans), les enfants sont renvoyés chez leur grand-mère à Stamps. Ils y grandissent, fréquentent l'école, s'y font des amis, découvrent le plaisir de lire, aident au magasin...
Ce n'est que plus tard qu'ils retrouveront leur mère mariée à Monsieur Clidell, un homme gentil et honnête.
Puis c'est la guerre, les mentalités changent, le monde évolue, les Noirs prennent la place des Japonais envoyés dans des camps, ils peuvent étudier et travailler un peu plus facilement, du moins au Nord. Maya, tout en continuant ses études, va par exemple être la première Noire à être embauchée par la compagnie de tramway de San Francisco.
Un très beau roman, tout en douceur, même dans les passages les plus cruels, ou comment une fillette noire née dans la première moitié du XXe siècle devient une jeune femme intelligente et dégourdie. Dans la suite, Tant que je serai noire aux éditions Les Allusifs, l'auteur – née le 4 avril 1928 à Saint-Louis dans le Missouri – raconte sa vie de mère (elle a eu un fils, Guy), d'adulte à Harlem où elle est partie en 1957 pour devenir romancière (elle est aussi poète, dramaturge, chanteuse, danseuse, cinéaste, scénariste, actrice, professeur) et de militante (elle va rencontrer Vusumzi Make, militant pour les Noirs d'Afrique du Sud et va partir avec lui en Afrique où elle deviendra journaliste).
Du même auteur : La tête haute (Belfond, 1980).
Quelques extraits
À propos de Madame Flowers qui lui a fait découvrir la poésie : « Elle m'expliqua que je ne devais jamais tolérer l'ignorance, mais qu'il fallait faire preuve de compréhension à l'égard du manque d'instruction. Que certaines gens, dans l'impossibilité d'aller à l'école, avaient plus de savoir et même plus d'intelligence que des professeurs d'université. Elle m'encouragea à écouter soigneusement ce que les paysans appelaient la sagesse populaire : ces simples dictons contenaient l'expérience collective de multiples générations. » (pages 123-124).
Au cours de la deuxième guerre mondiale : « La vie ne valait pas cher et la mort était entièrement gratuite. » (page 315).
PS du 29 mai 2014 : c'est avec tristesse que j'apprends le décès survenu hier matin de Maya Angelou. Paix à son âme.
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