L'année du lièvre est une bande dessinée de Tian. Au revoir Phnom Penh est le tome 1 de cette trilogie, il est paru aux éditions Gallimard dans la collection Bayou en avril 2011 (120 pages, 17 €, ISBN 978-2-07-062957-2).
Tian, né au Cambodge en avril 1975, est arrivé en France avec ses parents en 1980. En 2001, il est sorti diplômé de l'École des Arts décoratifs de Strasbourg. Depuis 10 ans, il est retourné plusieurs fois au Cambodge.
17 avril 1975. Après 5 ans de guerre contre les Américains, Phnom Penh est libérée par l'armée des Khmers rouges. Le peuple se réjouit alors mais ne connaît pas les motivations des Khmers rouges.
Khim, médecin, est parti à l'hôpital chercher le nécessaire pour son épouse, Lina, qui va accoucher sous peu. Il échappe de justesse à une arrestation et peut fuir avec toute sa famille.
D'ailleurs, le bébé de Lina et Khim naît à Ta Prom, un village, et il porte le nom de Chan comme l'arbre qui pousse à côté de la hutte et Veasna qui signifie le destin.
Le Cambodge devient le Kampuchéa démocratique. Les Khmers rouges veulent « réformer la société » pour qu'il n'y ait « plus d'injustice, plus de corruption ni d'inégalité de richesse » (page 27).
La famille de Khim ainsi que deux autres familles veulent aller à Battambang mais les Khmers rouges sont déjà à la Pagode de Rakakong et détournent les fonctionnaires et les intellectuels vers Kompong Cham.
Tian raconte ce qu'ont vécu ses parents et ses grands-parents (et lui, le bébé qui venait de naître et qui a survécu par miracle) avec une grande simplicité et une profonde humilité.
En lisant ce témoignage, j'ai ressenti bien sûr une grande émotion mais aussi une révolte ! Car qui a cru à ces slogans mensongers ? « Un Kampuchéa indépendant, uni, pacifique, où règnent le bonheur, l'égalité, la justice, la démocratie, sans riches ni pauvres, sans classe exploitante... » (page 106). C'est trop, n'en jetez plus ! Au milieu des années 70, on connaissait déjà le sort réservé aux populations d'Europe de l'Est et de Chine... Alors reconstruction, solidarité, union, prospérité, indépendance, paix, bonheur, égalité, justice... De bien beaux mots mais... De démocratie point ! Évidemment là, c'est moi qui porte un jugement, chose que l'auteur ne fait pas car il aime son pays d'origine et souhaite le bonheur de ses compatriotes.
Mais le ton de la bande dessinée est déjà donné dans l'intéressante préface de Rithy Panh, cinéaste connu pour le film documentaire S21, la machine de mort khmère rouge. Il parle de « succession de petits miracles » qui ont permis de fuir, de survivre, de recevoir l'hospitalité malgré le danger. Parce que dès le tout début, les populations ont fui et les habitants savaient que certains étaient exilés ou tués (fonctionnaires, intellectuels, etc.) mais les soldats étaient armés, dangereux et persuadés d'être dans leur bon droit.
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Un de mes passages préférés
« N'oubliez pas que dans ce nouveau régime, si vous voulez vivre... Il faudra planter du kapokier et du palmier autour de la maison. » (pages 74-75). « C'est un vieux proverbe khmer qui veut dire 'Ne rien voir, ne rien entendre et ne rien dire'. » (page 76).
Le challenge BD PAL sèches de Mo' continue avec cette 28e bande dessinée avec le Cambodge en plus pour les origines géographiques.