La sagesse de l'éditeur est un essai de Hubert Nyssen paru à L'œil neuf éditions en septembre 2006 (111 pages, 12,50 €, ISBN 978-2-915543-13-1).
Plutôt que de montrer la « sagesse » de l'éditeur, Hubert Nyssen, né à Bruxelles en 1925, préfère montrer la « folie » de l'éditeur.
Il raconte son parcours : pas seulement comment il est devenu éditeur (Actes Sud, créé en 1978, est pour moi un des plus importants éditeurs français des XXe-XXIe siècles), mais aussi comment il a découvert la lecture grâce à sa grand-mère (pour moi aussi, ce fut – en partie – grâce à une grand-mère). « Ce jour-là, elle venait de me révéler un monde que je n'aurais pu nommer encore mais qui serait désormais le mien. Tout avait été déversé d'un coup par sa malicieuse question : le livre, la lecture, le texte et sa traduction. Et tout y était : la découverte, l'aventure, l'écriture et le talent. » (page 6).
Son écriture est fluide, et puis le récit est court, on ne s'ennuie pas, on fait la connaissance des auteurs qui ont compté dans sa vie d'éditeur : Nina Berberova, Paul Auster, André Markowicz.
Il raconte des anecdotes, parfois amusantes. Découvrez par exemple ce qu'il a fait de L'art de la joie : « ce 14 x 24, de quatre centimètres d'épaisseur, qui pèse plus d'un kilo, et les premiers soirs, non content de me donner des crampes quand je le tenais au-dessus de moi, il a failli plusieurs fois m'éborgner en me tombant sur la figure après m'avoir échappé au moment où, pour tourner une page, je ne le tenais plus que d'une main. » (page 68). Il dénonce la dérive commerciale (des auteurs et des éditeurs) et le fait que le livre soit devenu un produit de consommation et le lecteur un consommateur. Il cite plusieurs auteurs, y compris publiés chez d'autres éditeurs.
Et pour conclure et vous donner envie de lire ce petit livre, je voudrais vous faire lire cet extrait : « À l'origine, l'écriture était par excellence le lieu de rencontre de trois folies. Celle de l'auteur qui cherchait par elle à formuler l'intime de ses affects et le distillat de sa réflexion ; celle de l'éditeur qui, s'investissant et investissant dans la publication, voulait obtenir la reconnaissance de sa perspicacité et le bénéfice de son initiative ; celle du lecteur qui espérait y trouver réponse ou écho à cet obscur désir d'absolu que l'on appelle incomplétude. » (pages 46-47).
Je me laisserai certainement tenter par des Sagesses d'autres métiers, en particulier photographe, bibliothécaire, ethnologue et potier !
Mais dans cette collection « Sagesse d'un métier » dirigée par Jean-Claude Béhar, il y a aussi astronome, écuyer, femme de radio, jardinier, médecin, monteuse de film, parfumeur, physicien...