Le front russe est un roman de Jean-Claude Lalumière paru aux éditions Le Dilettante en août 2010 (252 pages, 17 €, ISBN 978-2-84263-192-5).
Je l'ai reçu en poche (février 2012, 210 pages, 6,10 €, ISBN 978-2-253-16011-3) et je remercie Babelio et Le livre de poche pour ce roman.
Jean-Claude Lalumière est né en 1970 à Bordeaux. Plus d'infos sur son blog. Le front russe est son premier roman : chouette, je vais pouvoir le mettre dans le challenge Premier roman.
Né dans les années 70 près de Bordeaux, élevé dans l'ordre et le conformisme, le narrateur rêve depuis l'enfance de voyages et de dépaysement. Tout cela grâce à quelques magazines Géo et à l'atlas offerts par son oncle Bertrand.
Le jeune homme raconte comment il est entré au Ministère des Affaires étrangères et pourquoi il ne visite ni l'Orient ni l'Amérique latine : il passe effectivement le plus clair de son temps dans un bureau... Ou plutôt un placard !
« On vous envoie sur le front russe ! C'est vache pour un nouveau ! » (page 41).
Eh oui, envoyé dans le bureau des pays en voie de création, à la Section Europe de l'Est et Sibérie créée après la chute du mur de Berlin... Le front russe.
Il aura quand même une mission pour accueillir pendant trois jours à Paris, les 42 membres de la délégation de Iakoutie, puis une mission diplomatique d'un week-end en Géorgie.
« Du bonheur à partir, j'en éprouvais, je dois l'admettre. La Géorgie figurait parmi les destinations qui avaient éveillé mon imagination autrefois, […]. La mer Noire, le Caucase, la ville de Tbilissi […] ; c'étaient ces endroits-là, parmi d'autres, qui avaient suscité ma vocation pour les affaires étrangères. Je rêvais depuis toujours de ces pays où le voyageur débarque avec une pointe d'angoisse à l'estomac à l'idée de découvrir des territoires inconnus et peut-être dangereux. » (page 115). Mais... « je notai la présence de presque toutes les grandes enseignes commerciales occidentales. J'avais l'impression d'être loin sans être ailleurs. Ma frustration était immense. » (page 117).
Ainsi, cette première mission à l'étranger, ce premier voyage sont une déception...
Malgré ses compétences et sa motivation, la vie professionnelle de ce jeune provincial est un gâchis. Sa vie privée n'est pas meilleure, il vit dans un appartement minuscule, n'arrive pas à se détacher de papa-maman et foire sa relation avec Aline...
Ce roman m'a plu, ce fut une lecture bien agréable, et je l'ai trouvé drôle même si je n'ai pas ri aux éclats. J'ai beaucoup aimé l'échange kafkaïen au sujet du pigeon mort sur le pare-soleil métallique à l'extérieur (page 69 à 79) et en fait, j'ai éclaté de rire en lisant « Si, mais dans ce cas, il me faut une demande écrite » (page 72) mais il faut vraiment lire ces dix pages d'échanges pour comprendre. Avoir un premier emploi, c'est bien ; travailler dans la fonction publique, c'est bien ; être mis au placard dès le premier jour et se rendre compte qu'on va sûrement le rester toute sa vie, c'est totalement déprimant. Mais l'auteur fait rire et le lecteur se prend d'affection pour ce jeune homme naïf et empoté.
Deux extraits qui m'ont interpellée. « Le pot est au monde du travail ce que la boum était à notre adolescence : une occupation récurrente, régulière, rassurante, d'oublier la tristesse et la monotonie de l'année qui s'écoule avec lenteur jusqu'aux prochaines grandes vacances en y introduisant des moments de communion, d'entrain forcé autour de boissons et de nourritures incertaines (pages 157-158). |
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« Qu'est-ce qui vous a attiré dans la diplomatie ? me demanda-t-il soudain. […]
– L'envie de voyager.
– Vous n'avez pas choisi pour cela la meilleure administration. J'ai dix-huit ans de carrière et j'ai très peu voyagé durant tout ce temps. Et les rares fois où cela m'est arrivé, je n'ai eu droit qu'à des aperçus des villes dans lesquelles je me suis rendu. Je connais bien les aéroports et les ambassades, mais les villes, les pays, je ne les ai pas vus. » (page 168).
PS du 19 mars : une photo de Jean-Claude Lalumière prise au Salon du livre de Paris ici.
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