Léodine l'Africaine est un roman d'Albert Russo paru chez Ginkgo éditeur en septembre 2011 dans la collection Lettres d'ailleurs et d'ici (206 pages, 15 €, ISBN 978-2-84679-095-6).
Je remercie Marine D. et les éditions Ginkgo de m'avoir envoyé ce roman intéressant et dépaysant.
Albert Russo est né dans les années 40 au Congo belge (Zaïre) et a grandi en Rhodésie (Zimbabwe). Mère anglaise, père italien, Africain blanc ! Il partage sa vie entre l'Afrique, l'Europe et les États-Unis et écrit dans deux langues, français et anglais. Il a écrit plusieurs « romans africains » et il est considéré comme « l'écrivain par excellence du métissage ».
Léodine vit avec sa mère et n'a jamais connu son père – américain – mort dans un accident d'avion.
Elle raconte l'histoire de sa famille.
Sa grand-mère maternelle, Belge, avait quitté le Congo pour passer les années de guerre en Europe avec ses enfants. À l'époque, Astrid (la mère de Léodine) avait 16 ans et avait rencontré un GI du Minnesota, Gregory Burton. Ils se sont aimés, mariés, puis le jeune couple est parti vivre aux États-Unis, à Duluth, mais Astrid ne supportait pas la vie dans le Middle-West et elle est retournée au Congo. C'est là que Léodine est née, à Elisabethville. Gregory devait rejoindre son épouse et sa fille : il n'est jamais arrivé...
Un jour, Léodine apprend par hasard que sa grand-mère paternelle était une esclave affranchie donc une Noire. Sa vie bascule.
« J'avais tout à coup l'impression que l'on venait de m'arracher quelque chose dans la région du ventre, ou était-ce plus haut ? Il me semblait aussi que je me vidais lentement de mon sang et, qu'à la place, on m'injectait un poison. Ce qui me déconcerta plus que tout c'est que, dans le même corps, je me sentais subitement autre, comme si celui-ci avait cessé de m'appartenir. » (page 29).
C'est que, dans le Congo de l'après-guerre, les Blancs vivent avec les Blancs et les Noirs vivent avec les Noirs. Même si les enfants des Blancs peuvent avoir des amis Noirs.
Léodine va se rapprocher, à l'insu de sa mère, d'une camarade de classe noire, Yolande et de son frère, Mario-Tendé.
« Le Mwani Ndeze ponctuait ses réminiscences de proverbes bantous, tous plus savoureux les uns que les autres, tous empreints de bon sens ou de sagesse. Je me souviens, entre autres, de ces quelques perles :
[…]
Le morceau de bois resterait des années dans l'eau qu'il ne se transformerait pas en crocodile. » (page 110).
Je ne cite que mon proverbe préféré mais il y en a plus d'une vingtaine d'autres.
« Les souvenirs sont-ils autre chose qu'une suite d'illusions, la déformation plus ou moins voulue du passé ? » (page 159).
Albert Russo a grandi en Afrique, il aime ce continent. Il en a vu aussi les bouleversements et les tragédies depuis la deuxième moitié du XXe siècle. On sent en lui beaucoup de tendresse pour l'Afrique et les Africains. On sent aussi dans le récit de Léodine la beauté de l'Afrique, des paysages, des humains, des animaux, et une douceur de vivre disparue.
Léodine va entrer dans l'adolescence, et c'est à ce moment-là qu'elle apprend qui était sa grand-mère paternelle. Pour elle, c'est vraiment difficile, elle devra comprendre qui elle est, qu'elles sont ses origines et s'accepter comme elle est.
Lorsqu'elle se rappelle le voyage avec sa mère et le nouveau compagnon de celle-ci au Rwanda et dans la région des Grands Lacs, c'est grandiose : l'Afrique, les lacs, les animaux sont magnifiques. Mais l'adolescente va vivre une expérience horrible : c'est comme s'il y avait toujours l'irruption de la violence dans cette Afrique paradisiaque qui n'existe plus par la faute des hommes, Blancs ou Noirs.
Ce roman initiatique plein de souvenirs m'a dépaysée et passionnée, et j'espère qu'il en sera de même pour vous. Vous pouvez lire les 30 premières pages sur le site de l'éditeur.
Comme Léodine l'Africaine est l'histoire d'une adolescente, je me demande bien si je ne peux pas mettre ce roman dans le challenge Littérature jeunesse & young adults, pour la même raison que j'avais mis le Journal (1918-1920), de Nelly Ptachkina, une adolescente russe.
Je le mets aussi dans le challenge Voisins Voisines puisque l'auteur est Belge avec des origines anglaises et italiennes.
commenter cet article …