Un éléphant dans la poussière est un thriller de J.F. Braun paru en novembre 2010 aux éditions Jacques André éditeur dans la collection Traits noirs (321 pages, 22 €, ISBN 978-2-7570-0194-3).
En même temps que La partie de Mah-jong de l'Empereur, d'Adam Katzmann, j'ai reçu ce thriller et je remercie Jacques André éditeur de m'avoir envoyé ce roman qui m'a beaucoup plu.
J.F. Braun est Lyonnais, il est spécialiste de l'histoire contemporaine russe (ça se voit !).
Philip James Forster, 39 ans, est un Américain de la classe moyenne : il habite dans une jolie maison avec son épouse Sharon, directrice de publication, et leur deux enfants, Kelly et Tim. Bref, il a une vie normale avec un poste à responsabilité chez Caltronic, des collègues, des amis, et un laboratoire qu'il a aménagé dans le sous-sol de sa maison car il est passionné de photographie.
Mais Philip James Forster est un « dormant » depuis 1971 ! Il a en fait 42 ans, s'appelle Nicolas Igorovitch Ostarov, est le fils d'un célèbre Général au pouvoir dans les années sombres de l'URSS, a été élevé par sa tante : « Je ne l'ai jamais vue faire la queue. […] J'étais un garçon insouciant, mais il y avait un tel gouffre entre la réalité et la propagande qu'il était impossible de l'ignorer. » (page 23). Puis il a été formé à Clifton en Ukraine sous le gouvernement d'Andropov : « Tu imagines les milliers de roubles qu'il a fallu pour en arriver là ? On compte sur toi. Tu dois devenir un grand scientifique. Après tes études, tu travailleras dans les meilleures firmes impérialistes. À notre profit bien sûr. Comme tu le sais, nous accusons un certain retard en électronique. Tu es un des jokers qui nous permettra de rattraper les Américains. » (page 41). Il est arrivé par le Canada, a étudié aux États-Unis : « À Berkeley, j'ai appris qu'un certain retard était une litote polie. En réalité, c'était un fossé abyssal qui nous séparait des Occidentaux. » (page 41). Pendant toutes ces années, il a fourni des informations aux Soviétiques en particulier sur des projets top-secrets. Un peu moins depuis la chute de l'empire soviétique et l'arrivée au pouvoir d'Eltsine.
Un soir, Biplan, un « disjoncteur » prend contact avec lui pour le renvoyer en Russie. « On élaguait les branches mortes, on mettait les réseaux en sommeil et surtout, on essayait de rapatrier les taupes les plus menacées dont, semblait-il, je faisais partie. » (page 10). Mais Forster veut rester en Californie : « Non, rentrer était impensable. Je n'avais plus là-bas ni famille ni relations. […] Je n'avais pas remis les pieds en Russie depuis 1971. […] Je pensais, je rêvais en anglais. Je ne serais jamais un vrai Américain mais je n'étais plus soviétique et je n'avais guère envie de devenir russe. Au fond, je n'étais qu'un bâtard de la guerre froide fourvoyé entre les deux mondes. » (page 14). Il se débarrasse de l'homme et s'enfuit sous une autre identité : il avait tout prévu car il savait que ça arriverait un jour... « J'avais perdu tout ce que j'avais construit depuis vingt ans. Il n'y avait pas d'alternative. Si je voulais sauver sauver ma peau ou éviter de moisir en prison pendant trente ans, je devais fuir à l'autre bout du pays. » (page 49). Commence alors une course-poursuite, entre lui et le FBI, et entre lui et ce qui reste du KGB.
Dans ce récit, à la fois thriller et roman d'espionnage, Forster raconte ses souvenirs (c'est passionnant) et sa fuite dans un road movie haletant où il va être confronté à Toundra, l'homme qui l'a fait entrer aux États-Unis et à des mercenaires sans foi ni loi.
Il va aussi rencontrer des personnes qui vont l'aider, Alice dont il va tomber amoureux, Gary qui va l'embaucher et l'emmener à la pêche, et Cowper un ancien de la CIA qui vit en Asie et qui analyse la situation : « Vous n'êtes peut-être qu'un éléphant qui piétine dans la poussière, un leurre pour nous dissimuler la réalité. » (page 127).
Un très bon thriller à lire pour découvrir l'époque soviétique et la vie des agents dormants.
Je le mets donc dans le challenge Une année en Russie.
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