Zahra's Paradise est une bande dessinée dramatique iranienne de Khalil et Amir qui paraît en épisodes sur Delitoon depuis le 12 juillet 2011 : il y a pour le moment 15 chapitres soit 150 pages.
Printemps 2099, Evin, un hameau au nord de Téhéran. Un garçon prend plaisir à regarder les six chiots qui viennent de naître téter leur mère. Mais un homme s'empare des chiots, les met dans un sac, les écrase avec une pelle et les jette dans la rivière... Zahra's Paradise, c'est le cimetière et on ne va pas payer l'imam pour faire enterrer des créatures impures. Heureusement le garçon a pu sauver un chiot.
Juin 2009, Téhéran. Zhara Alavi, une femme iranienne, se confie à Miriam, son amie d'enfance arménienne (image ci-contre). Son fils, Mehdi, 19 ans, n'est pas rentré alors qu'il est en plein partiels et elle est très inquiète. Elle a couru dans les rues et les hôpitaux mais ne l'a pas retrouvé. Elle a vu des cadavres, du sang et la milice Bassidji qui emportait les blessés... Une génération tuée comme les chiots jetés dans le sac.
Un blog, Zahra's Paradise. « Ce blog est tout ce qu'il reste d'eux. » (chapitre 1). Ce blog, c'est Hassan, le fils aîné qui l'alimente. Lui aussi a été arrêté, lorsqu'il était étudiant, 10 ans auparavant. Rien n'a changé... Mais « C'est à mon tour de publier. Je vais tester le pouvoir de mon blog face à leurs médias. Je rendrai publique l'absence de Mehdi, j'imprimerai son visage pour couvrir le leur. Et le monde saura ! » (chapitre 4).
Zahra et Hassan cherchent Mehdi partout (hôpitaux, commissariat, tribunal, morgue, prison) mais il n'est nul part, comme s'il n'avait jamais existé... Un jour, dans un bureau, Zhara et Hassan font la connaissance de Madame Ardalan, issue de l'aristocratie déchue en 1979 ; elle propose de les aider.
Malgré des choses de plus en plus horribles comme la milice qui matraque, deux étudiants pendus à une grue car ils sont homosexuels (chapitre 5, image ci-contre, cliquez sur l'image), la torture et les viols des jeunes gens dans les prisons (chapitre 9), on a l'impression que le peuple iranien ne cède pas au désespoir et continue d'espérer et d'essayer de faire bouger les choses. Et puis il y a les gens qui veulent aider, souvent parce qu'eux aussi ont souffert, subi une injustice : Miriam, le chauffeur de taxi, Timour du magasin de photocopies et sa nièce Sepideh, Madame Ardalan, l'oncle Bahodar spécialiste du sanskrit. Mais tous se heurtent au gouvernement et à ses sbires militaires ou religieux qui dirigent tout.
J'ai compris la parabole des chiots, un seul de sauvé et il représente tous les autres, pour qu'une génération ne soit pas totalement perdue. C'est triste quand même, combien de vies prises pour rien ? Enfin pas pour rien, pour la liberté ! Le choix de vouloir être libre, le droit à la liberté, vite réprimé... Et le survivant : quel traumatisme va-t-il véhiculer et transmettre ? Quel message va-t-il délivrer à une jeunesse éperdue de liberté et à un peuple asservi ?
J'ai appris que la javanmardi était le code d'honneur de la chevalerie persane, « à ne pas confondre avec la namardi, la couardise » ! (chapitre 4) et qu'en Iran, le week-end est le jeudi et le vendredi (chapitre 11).
Une bande dessinée dure, mais agréable à lire ; de beaux dessins en noir et blanc ; un témoignage qui représente tous les témoignages de l'été 2009 (cliquez sur l'image ci-contre) – déjà deux ans, que s'est-il passé en deux ans ? – une révolte latente pas seulement chez le jeune Hassan, et une pointe d'humour pour ne pas sombrer dans le désespoir.
Cette bande dessinée va-t-elle être publiée en album ?
En tout cas, elle est – pour l'instant – disponible librement sur Delitoon alors profitez-en pour la lire parce que c'est un sacré témoignage sans faux-semblant et sans concession !
Cette bande dessinée est la trentième que je présente pour le challenge PAL sèches de Mo' et l'Iran fait son arrivée dans les origines géographiques.