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9 mai 2013 4 09 /05 /mai /2013 13:59

La bibliothèque des instruments de musique 악기들의 도서관 est un recueil de nouvelles de KIM Jung-hyuk 김중혁 paru aux éditions Decrescenzo dans la collection Micro-fictions en octobre 2012 (126 pages, 15 €, ISBN 978-2-36727-001-2). Ces textes (2008) sont traduits du coréen par Moon so-young, Lee Seung-shin, Hwang Ji-young, Lee Tae-yeon, Jeong Hyun-joo, Lee Goo-hyun et Aurélie Gaudillat qui signe la préface.

 

Kim Jung-hyuk est né en 1971 à Kimcheong (province de Gyeongsang, Corée du Sud). Il a suivi des études littéraires. Il est écrivain, illustrateur, journaliste, photographe, web-designer et disc-jockey.

Ses recueils de nouvelles : Penguin news (2006), Que sera, sera (2011), 1F/B1 (2012). La bibliothèque des instruments de musique est son deuxième recueil de nouvelles.

Ses romans : Les zombies (2010), Mister Monorail (2011).

Plus d'infos sur son blog, http://www.penguinnews.net/ (en coréen !).

 

Les éditions Decrescenzo sont situées à Fuveau, près d'Aix en Procence. Elles ont été fondées par Jean-Claude de Crescenzo et son épouse coréenne, Kim Hye-gyeong de Crescenzo, et sont dirigées par Franck de Crescenzo, leur fils. Elles publient exclusivement à la littérature coréenne.

 

La bibliothèque des instruments de musique

Titre original : Akkideuleui doseogwan

En sortant du travail, le narrateur a été percuté par une voiture sur le passage piétons. Pendant que son corps est projeté en l'air, cette phrase lui vient à l'esprit : « C'est injuste de mourir anonyme. » (page 23). Par miracle, il reste en vie, et quelques mois après, il est embauché au magasin Musica. « Je n'ai pas vraiment le physique pour vendre des instruments de musique. – Ha ! Ha ! Vous pensez qu'il y a un physique pour vendre des instruments ? Vous êtes un comique ! » (page 33). Le jeune homme se prend de passion pour les instruments et la musique. « Mon cœur vibrait à chaque note. » (page 35). Il veut même créer une nouvelle classifications pour les instruments et se met à enregistrer leurs différents sons.

Cette première nouvelle, qui donne le titre au recueil, entre bien dans le vif du sujet : un événement inattendu bouleverse la vie d'un jeune homme qui cherchait sa place dans la société. Une société hiérarchisée, dure, impitoyable, dans laquelle le « Ce qui ne me tue pas me rend plus fort » de Friedrich Nietzsche a toute sa place. L'autre thème qui a son importance est la musique, elle va permettre au jeune homme de « revivre », de trouver sa place, de s'épanouir et de faire quelque chose d'utile.

 

B et moi

Titre original : Nawa B

Le narrateur travaille dans un magasin de disques mais l'industrie du disque est en crise et les affaires vont mal... Un soir, il est confronté à un voleur qu'il revoit une semaine plus tard jouer de la guitare dans le parc. Contre toute attente, ils vont devenir amis et B propose au vendeur de lui enseigner la guitare. « Pathétique ! Je rêvais de devenir guitariste mais mon corps s'y refusait. » (page 59). Alors que le vendeur, ayant entre temps perdu son emploi (le magasin a fermé), développe une allergie qui l'empêche de jouer, B devient « un jeune guitariste talentueux et prometteur » (page 61).

Dans cette nouvelle, deux êtres que tout oppose (un vendeur et un voleur) vont se rapprocher grâce à leurs points communs : la guitare et leur amour de la musique. Ce récit est moins douloureux que le précédent mais il montre deux choses indispensables dans la société coréenne : le travail et une bonne santé. Et si dans la première nouvelle, la confiance du patron rendait le jeune homme fort face à sa nouvelle vie, c'est ici l'amitié entre les deux hommes qui les renforce mutuellement.

 

D le décalé

Titre original : Eotbakja D

En regardant le film d'un concert de musique qu'il a produit, le narrateur reconnaît D le décalé qu'il a connu il y a vingt ans : ils étaient ensemble au lycée et dans la chorale pour la fête de fin d'année. En fait, l'homme saute au moment où les autres retombent ce qui le fait paraître plus grand. Pas de doute, il mérite toujours son surnom de décalé ! « Il est trop rigolo, ton ami. Si on le mettait dans l'intro ? Et pourquoi pas sur la jaquette du DVD ? » (page 76). Après la sortie du DVD, le narrateur est contacté par D pour organisé le concert de Double Dubbing. Bien que gêné, le producteur accepte et ne le regrette pas : « Double Dubbing et son groupe régnaient en maîtres sur la scène au point qu'il était difficile de croire que c'était leur premier concert. » (page 96).

Pas facile de revoir un copain de classe qu'on n'a pas vu depuis vingt ans et qui avait été la risée de tout le lycée tant il chantait faux (D représente en fait la note ré qu'il forçait). Mais accepter de le rencontrer et donner sa chance au Décalé peut être bénéfique pour les deux hommes. Toujours la musique, importante, et puis là, un traumatisme, réglé vingt ans après, pas de haine, mais D prend sa revanche, pas une vengeance hein !, une revanche, sur ses anciens copains de classe et le professeur de musique, sur la musique, et gagne le respect de tous.

Cette nouvelle a reçu le Prix littéraire Kim Yu-jeong en 2008.

 

Les maniaques de vinyles

Titre original : Binilgwand sidae

Pour payer ses études, le narrateur travaille la journée chez un disquaire et le soir comme disc-jockey sous le pseudonyme de DJ Stiff. Lui et son ami, DJ Koala, souhaitent devenir DJ pro après l'épreuve de la fête de fin d'année. « Dans nos moments d'ennuis nous communiquons par mixages interposés […]. Personne ne comprend ce que nous disons, mais c'est notre manière de communiquer. » (page 111). Un soir, ils vont choisir des disques au Réserv'vinyle et y rencontrent un étrange collectionneur. Celui-ci invite DJ Stiff à venir voir ses disques mais il l'enferme des jours dans sa cave car il déteste les DJ qui, à son avis, ne font pas de la vraie musique.

Ici, pas de perte d'emploi et pas d'accident, mais un étudiant confronté à la folie d'un homme, d'un inconnu, et qui a subi un éprouvant enfermement. DJ Stiff n'en sort pas sans dommages, à tel point qu'il ne peut plus faire de musique... Heureusement, la musique est plus forte que tout et l'amitié de son ami l'aidera à retrouver ses esprits et à refaire surface. Encore une fois, il y a la musique, décidément très importante dans ces quatre récits, et le thème déjà abordé de la bonne santé est considéré ici sous la forme de la santé mentale.

 

Ainsi pour bien vivre et bien travailler dans la société coréenne, il faut un corps sain dans un esprit sain, et si on présente un éventuel décalage, une originalité ou une excentricité, il faut l'utiliser pour en faire quelque chose d'utile, quelque chose de bien pour soi et pour tous, souvent en saisissant une opportunité liée à un événement inhabituel tels que ceux décrits dans les quatre récits !

Ces nouvelles m'ont plu aussi parce qu'elles abordent le thème de la musique ; elles sont une réflexion sur la vie et l'adversité, et également une réflexion sur la musique, la place de la musique dans la société coréenne et les relations qu'on peut avoir avec la musique.

Si vous aimez les nouvelles, la musique, la Corée, ou si vous êtes curieux, je vous conseille cet intéressant recueils de nouvelles dans lequel les quatre hommes s'en sortent mais pas dans la facilité. Elles ont la taille idéales, entre 20 et 25 pages, et sont écrites avec un certain humour et un réel talent d'écriture.

Un deuxième recueil de nouvelles de Kim Jung-hyuk est annoncé, Bus errant, j'ai hâte de le lire, ainsi que les autres auteurs de Decrescenzo !

 

Une lecture que je suis ravie de placer dans le Printemps coréen et aussi dans 1 % de la rentrée littéraire 2012, Je lis des nouvelles et des novellas, Petit Bac 2013 (catégorie Objets) et Tour du monde en 8 ans (Corée du Sud).

 

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commentaires

S
Le domaine de la musique n'est pas si souvent abordé en littérature, en domaine d'art on y trouve plus souvent la peinture(il faut dire aussi que la peinture est sans doute plus facile à décrire et à imaginer).<br /> C'est dur ce refus de tout décalage ou originalité physique.
Répondre
C
C'est sûrement dû à la dictature militaire et la répression, mais il me semble que les mentalités évoluent, heureusement !

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