« On ne doit jamais manquer de répéter à tout le monde les belles choses qu'on a lues » Sei Shônagon in « Notes de Chevet ». Lues, mais aussi aimées, vues, entendues, etc.
Si tu existes ailleurs est un roman de Thierry Cohen paru aux éditions Flammarion en mai 2012 (327 pages, 19,90 €, ISBN 978-2-0812-6303-1).
Je remercie Gilles Paris pour ce roman agréable à lire.
De Thierry Cohen, auteur français né au Maroc, j'avais déjà lu et apprécié – l'été dernier – Longtemps j'ai rêvé d'elle. Plus d'infos sur son site.
Avril 1981. Le docteur Aretha Laurens enregistre un enfant, Noam Beaumont. Àcause de son caprice, sa mère est morte percutée par une voiture.
« Le cœur, c'est ce qui fait vivre. » (page 12).
« Ensuite, j'ai pleuré. » (page 15).
Un mois après, Noam est dans le cabinet du docteur Laurens face à une fillette un peu plus âgée que lui mais ils ne se parlent pas et ne jouent pas ensemble.
« Je suis désolée mais... voir ce petit garçon me bouleverse. Et je veux préserver ma fille. » (page 20).
Cinq ans plus tard, Noam continue de voir le docteur Laurens. Lui et sa sœur aînée, Élisa, sont élevés par leurs grand-parents puisque leur père est devenu alcoolique à la mort de son épouse bien-aimée.
« Faut toujours qu'il y ait une raison ? – Il y en a toujours une, Noam. On peut essayer de la connaître ou ne pas se poser la question. » (page 25).
Noam travaille bien à l'école mais il n'a pas d'amis et sa seule relation est Élisa. Jusqu'au jour où il tombe amoureux de Julia. Il a 17 ans et le docteur Laurens lui annonce que c'est leur dernière séance car pour Noam, c'est une nouvelle vie qui commence : les études et l'amour. Mais cela ne va pas se passer comme prévu...
Juin 2011. Après une crise d'angoisse, Noam reprend ses « carnets de confidences », une sorte de journal qu'il rédigeait lorsqu'il était suivi par le docteur Laurens. Il faut dire que son travail de cadre commercial ne lui plaît plus trop, qu'il a un seul ami, Samy Dubois, qu'il n'a plus aucun contact avec son père, et que sa sœur a divorcé après avoir eu Anna. La vie n'épargne personne...
Un jour, sa nièce (Anna) qui n'a que 3 ans lui dit : « Tu vas mourir du cœur le même jour que cinq personnes. » (page 71). Noam prend cette phrase comme une prophétie et en fait une obsession. Une seule solution : retourner voir le docteur Laurens.
Les chapitres sont courts et percutants ainsi le roman se lit agréablement. Sous des dehors « légers », cette histoire nous parle de la mort, du deuil, de la folie, de l'alcoolisme, de la (non) relation d'un père avec ses enfants, de la relation quasi fusionnelle entre un frère et une sœur, mais aussi des enfants handicapés. Il y a d'intéressants passages (plutôt mystiques) sur des enfants autistes en Israël. Car Noam va se rendre en Israël pour rencontrer une étrange jeune femme qui utilise l'empathie et qu'il ne se souvient pas avoir déjà rencontrée. « Le piège, Noam, est de porter un regard de touriste sur ce que vivent les sociétés régies par d'autres valeurs que les tiennes. » (page 160). Finalement Thierry Cohen est une fine plume et sait tenir ses lecteurs en haleine avec des histoires mi- fantastiques mi-spirituelles. Ça s'appelle le talent, non ?