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27 décembre 2013 5 27 /12 /décembre /2013 15:02

Un spécimen transparent et Voyage vers les étoiles sont deux récits d'Akira Yoshimura parus aux éditions Actes Sud en octobre 2006 (151 pages, 16,30 €, ISBN 978-2-7427-6296-5). Tomei hyobon et Hoshi he no tabi sont traduits du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle.

 

Akira Yoshimura : je vous laisse consulter sa biographie et sa bibliographie sur ma précédente note de lecture, Le convoi de l'eau.

 

Un spécimen transparent Tomei hyobon (pages 9 à 88).

Le matin, dans le bus qui l'emmène au travail, Kenshiro Mitsuoka a l'habitude de s'asseoir à côté de jeunes femmes maigres parce qu'il essaie de les frôler et de sentir leurs os.

« La beauté ou la laideur de leur visage n'entrait pas en considération. Son seul but était la forme des os qu'il sentait pointer à travers les vêtements. » (page 12).

Souvent, il est déçu, mais là, à plus de 60 ans, c'est enfin l'extase. Il se rend ensuite au laboratoire de recherches de l'hôpital universitaire où, depuis 40 ans, il désarticule les cadavres au scalpel pour fabriquer des échantillons osseux.

« […] pour lui, les os devaient survivre à la disparition des chairs. » (page 43).

Depuis trois mois, il forme un jeune assistant, Kamo, au travail des cuves à cadavres.

Deux ans auparavant, Kenshiro a épousé Tokiko qui a une fille étudiante, Yoriko. Mais Tokiko ne lui a pas dit qu'elle était malade et il ne souhaite pas que les deux femmes découvrent qu'il fait des expériences chez lui sur des os d'animaux pour les rendre transparents.

Je ne vous dit pas ce qui a poussé Kenshiro Mitsuoka à faire ce travail et à expérimenter sur les os, il vous faudra le découvrir par vous-mêmes en lisant ce livre. Mais, pour lui, ce n'est pas une obsession ou une perversité, c'est sa vie tout simplement.

Un spécimen transparent est aussi surprenant que Le faste des morts, de Kenzaburô Oé lu en juin, mais je l'ai trouvé plus sensible et... moins clinique ! Sûrement parce que le style de Yoshimura est plus poétique, plus envoûtant. Du coup, ce récit m'a plus convaincue que Le faste des morts mais j'ai quand même été moins emballée que pour Le convoi de l'eau et j'espère que Voyage vers les étoiles me plaira plus.

 

Voyage vers les étoiles (星への旅 Hoshi he no tabi ) (pages 89 à 151) : Prix Osamu Dazai 1966.

Un camion a quitté Tokyo pour le littoral du nord du pays. À son bord, Keichi et des compagnons de route qu'il connaît depuis trois mois seulement. Se sont joints à eux trois inconnus, un homme et deux jeunes femmes, qui ont promis de partager les frais et de descendre en route. Après que le camion ait traversé un pont, l'homme descend et se jette sous un train.

Keishi suivait des cours dans une école préparatoire pour entrer à l'université mais, après avoir raté les examens, il a été pris d'une grande lassitude.

« À partir de cet instant, sa perception du monde avait changé du tout au tout. Les gens et la ville, tout s'était transformé en choses inorganiques aux couleurs passées, tandis que s'incrustait en lui un sentiment d'impuissance insurmontable, comme s'il n'avait rien à faire dans ce paysage […]. » (page 108).

Ses compagnons ne supportent plus leur vie, la société, la surconsommation et il sont donc tous partis avec une idée bien précise.

« Étaient-ils partis à la recherche d'un endroit pour en finir avec la vie ? » (page 127).

Un voyage vers les étoiles...

Eh bien, j'ai mis du temps à lire cette nouvelle après Un spécimen transparent et me voici à la fois perplexe et à la fois enthousiasmée par le récit. Yoshimura a un beau style, joliment poétique, mais il a une fascination morbide pour la mort ! Les personnages sont nostalgiques... D'une autre vie qu'ils n'auront pas ? D'une vie qu'ils ne veulent pas vivre ? Ils symbolisent en fait la jeunesse qui n'a plus goût à rien et qui n'a aucun espoir à par étudier puis travailler. C'est bien triste mais sûrement tellement réel, peut-être même encore plus maintenant qu'à l'époque où ce texte a été écrit !

 

Assurément Akira Yoshimura est un écrivain à découvrir et je vais encore lire d'autres titres de lui mais il demande de l'attention et quelques connaissances du Japon.

 

Pour les challenges

Écrivains japonais et

Des livres et des îles (Japon).

 

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16 décembre 2013 1 16 /12 /décembre /2013 00:32

Le livre du thé est un essai de Kakuzô Okakura paru aux éditions Synchronique en septembre 2013 (167 pages, 12,90 €, ISBN 978-2-917738-16-0). The book of tea (1906) est traduit de l'anglais par Aurélien Clause.

 

Je remercie Héloïse et Synchronique éditions de m'avoir envoyé ce livre après ma lecture de Gilgamesh, de Stephen Mitchell.

 

Kakuzô Okakura (岡倉天心) naquit le 14 février 1862 à Yokohama (Japon). Son père était un samouraï de haut rang. Enfant, il étudia les classiques de la littérature chinoise dans un temple bouddhiste. Il a huit ans lorsque les bateaux du commodore Perry arrivent dans la baie de Tokyo, ouvrant le Japon fermé depuis plus de deux siècles. Il étudia les langues et la culture occidentales dès 1877. Il devint cofondateur de la première Académie des Beaux-Arts à Tokyo et en devint l'administrateur en 1890 avant de créer l'Institut des Beaux-Arts du Japon en 1998. En 1904, il se rendit aux États-Unis et fut nommé conservateur du Département des Arts chinois et japonais du Musée des Beaux-Arts de Boston. Il défendit le patrimoine culturel et artistique japonais (à cette époque menacé) et écrivit plusieurs livres en anglais pour relier Orient et Occident. Il mourut le 2 septembre 1913.

 

The book of tea est originellement paru en 1906 à Boston (États-Unis), directement en anglais : ce texte était alors « destiné au cercle restreint des érudits du Boston du début du XXe siècle » mais « a touché en vagues concentriques un public toujours plus vaste » (préface de l'éditeur, page 7) et il permet, depuis plus d'un siècle, de découvrir l'art du thé et la culture japonaise. Ce livre, précédemment publié aux éditions Philippe Picquier (en 1996 et 2006), est réédité ici dans une nouvelle traduction à l'occasion du centième anniversaire de la mort de Kakuzô Okakura.

 

Si j'ai été surprise par le petit format du livre quand je l'ai reçu, j'ai vite été séduite par ce très joli livre-carnet qu'il est possible d'emmener partout et par l'élastique vert qui symbolise le thé vert et peut servir de marque-page.

Quant au contenu, il est tout bonnement une mine pour qui aime le thé et/ou le Japon !

Okakura écrit avec délicatesse et raffinement cette fameuse Voie du thé, cha-no-yu, issue du rituel zen, qui « consiste simplement à ramasser du bois, à faire bouillir de l'eau et à boire du thé, rien de plus » selon le grand maître de thé Sen no Rikyû (page 8).

Je vous rassure, je ne vais pas ramasser de bois et je ne fais pas bouillir l'eau pour préparer mes thés verts, qu'ils soient japonais, coréens ou chinois !

 

Vous apprendrez donc que le thé fut une médecine avant d'être une philosophie, un art et une boisson, qu'il a suivi une évolution et qu'il y a plusieurs courants et écoles de thé, reliés au Zen (Japon) et au Tao (Chine, d'où le thé est originaire), qu'il existe des classiques du thé comme le Tcha-king (en 3 volumes !) du poète Lou Yu qui a formulé le Code du thé ainsi que des Chambres de thé, suki-ya, et des maîtres du thé.

Qu'est-ce que le thé, comment le cultive-t-on et le récolte-t-on, commet sélectionne-t-on les feuilles, quels ustensiles utilise-t-on (Lou Yu en décrit vingt-quatre !) pour sa préparation et comment le prépare-t-on ? Si vous souhaitez connaître la réponse à une ou plusieurs de ces questions fondamentales, ce livre est fait pour vous !

Et Okakura parle aussi de spiritualité, d'histoire, d'architecture, d'art, de contes, et même de fleurs et de danse !, ce qui montre bien que le thé, c'est bien plus que du thé !

De plus, cet essai est abondamment illustré avec des estampes du célèbre Katsushika Hokusai (1760-1849), de pures merveilles.

 

J'ai noté quelques beaux extraits pour les partager avec vous.

 

Sur le taoïsme

« La vigueur d'une idée ne réside pas moins dans son aptitude à s'imposer dans la pensée de son temps que dans sa capacité à dominer les mouvements ultérieurs. » (page 60).

« Pour le taoïste, celui qui se rend maître de l'art de la vie est l'Homme Véritable. » (page 67) et un peu plus loin, « Pour lui [le taoïste], les trois joyaux de la vie sont la Compassion, la Simplicité et la Modestie » (page 68).

 

Sur le zen

« Le zen, comme le taoïsme, est le culte du Relatif. Un maître le définit comme l'art de discerner l'étoile polaire dans l'hémisphère sud. La vérité ne peut être atteinte que par la compréhension des contraires. […] Rien n'est réel, si ce n'est ce qui touche au fonctionnement de notre esprit. » (page 70) et cette histoire :

« Houei-neng, le sixième patriarche, vit un jour deux moines qui observaient le drapeau d'une pagode flotter au vent.

L'un déclara :

– C'est le vent qui bouge.

L'autre :

– C'est le drapeau qui bouge.

Houei-neng leur expliqua alors que le mouvement réel n'était ni celui du vent ni celui du drapeau mais provenait de leur propre esprit. » (pages 70-71).

J'adore ! Vous savez pourquoi ? Parce que les trois ont raison !

 

Sur l'histoire

« Riche d'anecdotes, d'allégories et d'aphorismes, l'histoire serait sans valeur si elle n'était pas édifiante et divertissante. » (page 61) : clin d'œil à mon ami F., historien et écrivain à ses heures pas perdues.

 

Sur l'art

« […] l'art n'a de valeur que dans la mesure où il nous parle. Il est un langage universel seulement si notre sensibilité l'est également. » (page 118).

Et ce passage superbe : « Artistes qui luttent, âmes lasses tapies dans l'ombre d'un froid dédain ! Quelle inspiration peut leur offrir notre siècle égocentrique ? Le passé peut bien regarder avec pitié la pauvreté de notre civilisation ; le futur rira de la stérilité de notre art. Nous détruisons l'art en détruisant le Beau au cœur de la vie. Si seulement quelque sorcier pouvait, dans le tronc de notre civilisation, sculpter une harpe dont les cordes résonneraient sous les doigts d'un génie ! » (page 123).

 

Mais revenons au thé !

« Grande fut l'ingéniosité des maîtres de thé lorsqu'ils produisirent ces effets de sérénité et de pureté. » (page 85).

« Ainsi, dans la chambre de thé, on suggère la fugacité de l'existence par le toit de chaume, la fragilité par les minces piliers, la légèreté par la structure de bambous et l'insouciance apparente par l'usage de matériaux familiers. L'éternel ne se trouve que dans l'esprit qui, incarné dans la simplicité du décor, l'embellit de la subtile lumière de son raffinement. » (page 94).

 

Le livre du thé est comme un livre-bonheur qui apporte une lecture enrichissante et édifiante et qui, je l'espère, vous amènera à découvrir le thé – si ce n'est déjà fait – et à élever votre esprit, loin du tumulte ambiant. Mais je vous souhaite quand même de passer de belles fêtes, calmes et sereines, et pourquoi pas de rajouter ce petit livre au pied du sapin ?

 

Pour les challenges 1 % de la rentrée littéraire 2013 (essai), L'art dans tous ses états (art du thé et estampes), Beaux livres (malgré sa petite taille !), Des livres et des îles (Japon), Écrivains japonais, Petit Bac 2013 (catégorie Aliment/boisson) et Un classique par mois (première parution en 1906).

 

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26 novembre 2013 2 26 /11 /novembre /2013 11:52

Les années douces est un roman de Hiromi Kawakami paru aux éditions Philippe Picquier en mars 2003 (229 pages, 19 €, ISBN 978-2-87730-646-1). Sensei no kaban (センセイの鞄, 2000) est traduit du japonais par Élisabeth Suetsugu.

 

Hiromi Kawakami est née le 1er avril 1958 à Tokyo. Elle a étudié à l'Université pour femmes d'Ochanomizu. Sa première nouvelle, Kamisama (Dieu), fut publiée en 1994 et elle reçut le prix Akutagawa pour Hebi wo fumu (Marcher sur un serpent) en 1996. Quant à Sensei no kaban (La sacoche du professeur), il reçut le prix Tanizaki en 2000.

Du même auteur : Abandons chez Actes Sud en 2003 ; et chez Philippe Picquier : Cette lumière qui vient de la mer (2005), La brocante Nakano (2007), Manazuru (2009), Le temps qui va, le temps qui vient (2011) et Les dix amours de Nishino (2013).

 

Omachi Tsukiko, une célibataire de bientôt 38 ans, rencontre dans un bar-restaurant (genre izakaya) Matsumoto Harutsuna qui fut son professeur de japonais au lycée.

« Votre visage n'a pas changé, vous savez.

– Vous non plus, vous n'avez pas changé ! » (page 7).

Le veuf – qui a presque le double d'âge de Tsukiko – cite Sei Shonagon, Irako Seihaku, Bashô, Uchida Hyakken mais Tsukiko n'était pas très assidue aux cours de japonais...

De toute façon « à l'école, on n'apprend jamais les choses vraiment importantes ! dit-il en riant. » (page 54).

Ils ne se donnent pas vraiment rendez-vous, ils se retrouvent là, c'est tout. Repas, beuveries (saké), promenade au marché, dispute à cause des Giants (base-ball), ramassage de champignons avec le patron du bar, souvenirs...

« J'étais persuadée au fond de moi que je n'étais pas faite pour connaître l'amour. » (page 77).

Un jour, Tsukiko revoit un ancien camarade de lycée, Kojima Takashi, qui est divorcé et va lui faire la cour.

 

Chaque chapitre raconte avec tendresse et pudeur un moment, une histoire, un souvenir, et c'est agréable à lire, c'est doux, délicat, assez poétique, presque mignon mais c'est comme s'il n'y avait pas de lien entre ces chapitres ! Du coup, le récit semble décousu... Mais, dans les derniers chapitres, à partir de leur voyage sur l'île, j'ai trouvé leur histoire plus intéressante et continue.

« Nous étions graves. Nous l'étions toujours. Même quand nous plaisantions. » (page 224).

 

J'ai lu Hiromi Kawakami pour le challenge Écrivains japonais et je mets aussi ce roman dans le challenge Des livres et des îles (Japon ; ils vont sur une île mais il n'y a pas de nom).

 

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30 octobre 2013 3 30 /10 /octobre /2013 04:15

L'île de Tôkyô est un roman de Natsuo Kirino paru aux éditions du Seuil en avril 2013 (282 pages, 22,50 €, ISBN 978-2-02-103471-4). Tôkyô-jima (東京島, 2008) est traduit du japonais par Claude Martin.

 

Natsuo Kirino est née le 7 octobre 1951 à Kanazawa (préfecture d'Ishikawa, Japon). Elle est auteur de romans policiers parus en France aux éditions du Rocher (Disparitions en 2002) puis aux éditions du Seuil (Out, 2006, Monstrueux, 2010, Le vrai monde, 2010, Intrusion, 2011 et L'île de Tôkyô, 2013). Elle a reçu de nombreux prix littéraires.

Plus d'infos sur http://www.kirino-natsuo.com/ en japonais et en anglais.

J'ai déjà lu Intrusion en 2011 et il m'avait déroutée ; je dois maintenant relire cette romancière pour le challenge Écrivains japonais d'Adalana et il faut que je me dépêche avant la fin du mois d'octobre !

 

Après le naufrage de leur voilier, il y a cinq ans, Kiyoko et son mari, Takashi, ont nagé jusqu'à une île et n'ont pas pu en repartir.

L'île, « d'environ sept kilomètres de long sur quatre de large » n'abrite pas d'animaux dangereux et délivre à volonté bananes, taros et noix de coco. « À part qu'elle était inhabitée et que les secours n'arrivaient pas, on pouvait dire que c'était un paradis. » (page 11).

Trois mois après leur arrivée, un bateau de vingt-trois jeunes hommes s'est écrasé sur l'île. Ce sont eux qui ont baptisé l'île Tôkyô et donné, par nostalgie, par désespoir, des noms de lieux existants au Japon.

Puis, un autre bateau a abandonné onze Chinois, des clandestins.

Mais sur une des plages à l'est, il y a plusieurs dizaines de bidons d'aluminium scellés de couvercles jaunes et les Japonais pensent que ce sont des déchets radioactifs...

Après l'arrivée des Chinois, les Japonais qui n'ont « guère envie de nouer des relations avec des étrangers » (page 14) décident de vivre dans la partie ouest de l'île qu'ils appellent Tôkyô et les Chinois vivront dans la partie est que les Japonais appellent Hongkong et où se trouvent les bidons de la plage de Tôkaimura.

Les Chinois, eux, appellent l'île Tan (l'œuf). Ils sont menés par Yang (35 ans), ils sont triviaux, nus, sales et malodorants mais ils se débrouillent bien mieux pour leur survie que les Japonais. Par exemple, ils font se reproduire les lézards et les souris avant de les manger pour avoir continuellement une source de protéine, ils conservent les poissons en les faisant sécher et ils ont même trouvé des condiments (ail, piment sauvage) et fabriqué du sel !

« Une odeur appétissante s'élevait toujours de Hongkong, où une ambiance paisible faisait douter d'être sur une île déserte. » (page 15).

Mais après que les hommes de Hongkong aient construit des outils avec le métal des bidons et deux barques avec les arbres de l'île, Kiyoko accepte de partir avec eux.

« Horizon marin à perte de vue. Pas l'ombre d'une terre. C'était bien d'avoir quitté l'île, mais que comptaient-ils faire maintenant ? » (page 41).

 

Il est intéressant de voir comment les deux populations évoluent : « Tandis que Hongkong, par crainte de la pénurie de ressources, développait la productivité, Tôkyô s'intéressait à la culture. » (page 17).

Quant à Kiyoko, unique femme de l'île, encore désirable à 46 ans, elle est convoitée par tous les hommes et a plusieurs amants et maris après la chute mystérieuse de Takashi du haut de la falaise. Comment est-elle vraiment considérée par les hommes ? N'a-t-elle que son corps à offrir ? En tout cas, ses compatriotes japonais ne lui pardonneront pas sa trahison mais se dérideront à l'annonce de sa grossesse, tout un symbole proche de l'île-mère, l'île nourricière.

En 2008, L'île de Tôkyô, roman fascinant de l'âme humaine, du dépouillement et de la déchéance qui m'a autant déroutée qu'Intrusion, a obtenu le prix Junichirô Tanizaki.

 

Deux phrases qui m'ont interpellée.

« J'ai bien compris que, sans la civilisation, le cerveau humain régresse et retourne à l'état sauvage. » (page 74, journal de Takashi).

« Ça fait peur les choses qui déterminent toute une existence. » (page 207).

 

J'ai lu qu'un film de Shinozaki Makoto avait été adapté de ce roman en 2010. Je ne l'ai pas vu mais en voici l'affiche et la bande annonce. Et je peux vous dire que cela ne correspond pas à l'ambiance du roman ! L'actrice est trop jeune, trop sexy. Les acteurs sont trop propres et bien habillés. L'île est trop luxuriante. Et où sont les bidons de déchets ?

Une lecture pour les challenges Écrivains japonaisPetit Bac 2013 (catégorie Lieu) et bien sûr Des livres et des îles (île déserte apparemment au large des Philippines).

 

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30 août 2013 5 30 /08 /août /2013 03:45

Le convoi de l'eau est un roman d'Akira Yoshimura paru aux éditions Actes Sud en janvier 2009 (176 pages, 16,30 €, ISBN 978-2-7427-7150-9). Je l'ai lu dans la collection poche Babel paru en mai 2011 (174 pages, 6,50 €, ISBN978-2-7427-9777-6). Mizu no sôretsu (水の葬列 1976) est traduit du japonais par Yutaka Makino.

 

Akira Yoshimura (昭 吉村) est né le 1er mai 1927 à Tokyo (Japon). Il est auteur de plusieurs romans et a reçu de nombreux prix littéraires. Son épouse, Setsuko Tsumura (津村 節子), est également auteur. Il est mort le 31 juillet 2006 (il avait un cancer du pancréas).

 

Dans une vallée encore inexplorée, un hameau de grandes maisons est découvert après le crash d'un bombardier américain durant la deuxième guerre mondiale. Les habitants de ce village sont-ils des descendants de bannis qui vivraient là depuis plus de 300 ans ?

Mais le site de la rivière K. est idéal pour installer des barrages d'exploitation de l'électricité et les travaux du quatrième barrage, le K4, vont commencer.

Pour cela treize ingénieurs et soixante ouvriers sont envoyés à travers cette vallée méconnue, encordés pour éviter un accident.

Le narrateur, qui vient de passer quatre ans en prison, s'est fait embauché parmi ces ouvriers.

Les habitants du hameau vivent différemment, ils ont des traditions, des lois et ne souhaitent pas avoir de contacts avec les hommes du chantier. Que vont-ils faire lorsqu'ils seront expropriés, que feront-ils de l'argent reçu en échange et où iront-ils ?

Plus le narrateur les observe, plus il se sent proche d'eux.

 

« Au fur et à mesure que nous descendions le chemin qui serpentait, le torrent manifestait sa présence dans un murmure qui montait discrètement du ravin entre les arbres dressés à flanc de montagne, tandis que les maisons du hameau apparaissaient enfin dans leur totalité. » (page 14).

« On en fait jamais de manière face à la mort d'un homme sur un chantier. On se contente simplement des formalités indispensables. Se faire écraser par un convoi est fréquent, mais dès que le corps est dégagé, le convoi repart précipitamment sur ses rails et disparaît au fond de la galerie toujours éclaboussée de sang. C'est dire si la conduite des travaux ne tolère aucun arrêt en quelque endroit que ce soit. » (page 26).

« Et même si j'approchais de la quarantaine, j'avais senti le froid me gagner à l'idée que cette cruauté était peut-être restée tout ce temps au fond de moi, formant un noyau dur. » (page 40).

« On leur donnerait une forte somme d'argent pour quitter les lieux. Mais le drame en réalité prenait sa source dans cette indemnité. » (pages 110-111).

« Puissiez-vous vivre des jours paisibles. » (page 130).

 

En lisant ci-dessus les extraits de ce magnifique roman, vous avez peut-être visualisé l'évolution non seulement du récit mais aussi du narrateur. Dans un style sombre et précis, l'auteur décrit avec précision et fluidité la vallée vue d'en haut, le village minuscule en bas au loin, le groupe dans lequel tous (ingénieurs et ouvriers) sont liés (par une corde), la fatigue à cause de la difficile descente et des campements rustiques sur plusieurs jours, le danger continuel (la nature et le chantier), le hameau et la découverte (de loin) de ses habitants, le démarrage des travaux, un accident, un peu de bonheur (une source chaude) avec toujours en toile de fonds la vallée, la nature, l'eau, les arbres, la symbiose entre les habitants et le milieu dans lequel ils se sont confondus.

J'ai lu une interview de sa veuve qui explique qu'il partait seul, dans des endroits reculés, pour observer, s'imprégner de la magie des lieux et pouvoir la retranscrire dans ses romans. Eh bien, c'est vraiment réussi ! C'est même la perfection !

Et puis il y a l'introspection du narrateur (je ne vous dirai pas ce qu'il a vécu et pourquoi il a été en prison, je vous laisse le découvrir), et c'est parce qu'il a vécu cette introspection qu'il peut enfin tourner son regard vers les autres : pas en direction des ouvriers du chantier, non, ils sont trop proches de son passé, de la ville, de sa vie d'avant, non, en direction des habitants du hameau, et il va les épier, les comprendre, les aimer même.

En lisant ce court roman, la mélancolie s'est emparée de moi : d'abord, ce que je lisais était beau, ensuite, ce que j'imaginais n'existait plus, englouti par les eaux, comme dans un mini-déluge. Je crois qu'il existe une mélancolie de l'eau, je n'explique pas trop pourquoi, sûrement parce qu'elle est indispensable, elle est la vie, elle est la mort...

 

Akira Yoshimura était un auteur que je ne connaissais pas et que j'ai découvert grâce à des participants du Dragon 2012 (les liens vers leurs notes de lectures ici). En fait, je le connaissais de nom car le film L'anguille (うなぎ Unagi) réalisé par Shôhei Imamura (今村 昌平) est inspiré de son roman Liberté conditionnelle (仮釈放).

J'ai enfin lu Akira Yoshimura pour le challenge d'Adalana, Écrivains japonais, et je suis très enthousiaste. Je vais lire d'autres titres de lui, c'est sûr et certain !

 

Du même auteur

1990, Philippe Picquier : Les drapeaux de Portsmouth (ポーツマスの旗 Pôtsumasu no hata)

2001, Actes Sud : Liberté conditionnelle (仮釈放 Karishakuhô)

2002, Actes Sud : La jeune fille suppliciée sur une étagère (少女架刑 Shôjo kakei)

2004, Actes Sud : La guerre des jours lointains (遠い日の戦争 Tôi hi no sensô)

2004, Actes Sud-Babel : Naufrages (破船 Hasen)

2006, Actes Sud : Voyage vers les étoiles (星への旅 Hoshi he no tabi) précédé de Un spécimen transparent (とめいひょぼん Tomei hyobon)

2009, Actes Sud : Le convoi de l'eau (水の葬列, Mizu no sôretsu)

2010, Actes Sud : Le grand tremblement de terre du Kantô (関東大震災 Kantôdaishinsai)

2012, Actes Sud : L'arc-en-ciel blanc (白い虹 Shiroi niji)

 

Je mets cette lecture dans les challenges ABC 2012-2013 (lettre Y), Des livres et des îles (Japon), Je lis des nouvelles et des novellas (roman court) et Tour du monde en 8 ans (Japon).

PS du 2 septembre : Monsieur l'a lu et bien apprécié sauf les passages où le narrateur pense à ce qui s'est passé avec son épouse et ses enfants. Ce n'était pas utile, ça fait pièce rapportée, il aurait été préférable que le récit reste documentaire et contemplatif.

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29 juillet 2013 1 29 /07 /juillet /2013 17:54

Du sang sur la toile est un roman policier de Miyuki Miyabe paru aux éditions Philippe Picquier en juin 2010 (236 pages, 19,50 €, ISBN 978-2-8097-0185-2). L'édition en poche est parue en mai 2012 aux éditions Philippe Picquier. R.P.G - Shadow family (2001) est traduit du japonais par Karine Chesneau.

 

Miyuki Miyabe みゆき宮部 est née le 23 décembre 1960 à Kôtô, un arrondissement de Tokyo (Japon). Elle est romancière et nouvelliste (policier, science-fiction, histoire). Ses titres traduits en français : Une carte pour l'enfer, La libraire Tanabe, Du sang sur la toile, Crossfire, Le diable chuchotait (parus aux éditions Philippe Picquier) et Brave story adapté en manga.

 

Une nuit d'avril, un cadavre est découvert sous une bâche de chantier. C'est Tokoroda Ryôsuke : il a reçu vingt-quatre coups de couteau ! Comme le chantier est situé sur les quartiers limitrophes de Niikura et Yamano, c'est la 3e division qui mène l'enquête, menée par le capitaine Shimojima.

La 4e division, celle du capitaine Takegami, surnommé Gami, enquête sur un autre meurtre commis trois jours plus tôt dans le quartier de Shibuya. La victime est Imai Naoko, une étudiante qui travaillait à mi-temps au club de karaoké Jewel et qui a été étranglée.

Il s'avère que les deux meurtres sont liés et que les deux équipes se rejoignent pour enquêter ensemble à Shibuya.

« […] on découvrit non pas un, mais plusieurs éléments laissant supposer l'existence d'une connexion possible. » (page 21).

« Existait-il un lien personnel entre Tokoroda Ryôsuke et Imai Naoko ? La voilà, la question essentielle. Depuis le début, l'équipe d'investigation mettait toute son énergie pour le découvrir. » (page 25).

Kazumi a 16 ans, elle est la fille unique de Tokoroda. Elle dit à la police qu'elle est suivie et harcelée au téléphone. Elle et sa mère sont mises sous protection.

Les policiers découvrent que Tokoroda Ryôsuke avait une vie parallèle : il s'était créé une famille virtuelle sur Internet dans laquelle il était « Papa », avec une épouse « Maman », une fille « Kazumi » et un fils « Minoru ».

« Ce qu'ils découvrirent était complètement inattendu : Tokoroda Ryôsuke s'était créé une famille de substitution sur le Net ! » (page 67).

 

Du sang sur la toile est un roman policier qui paraît classique mais il est ingénieux car il est pratiquement construit comme un huis-clos (presque tout se passe au commissariat). Il interroge sur la famille, la communicabilité – problème essentiel au Japon – (entre les adultes, dans un couple, entre les parents et les enfants), sur la solitude, sur le virtuel (roman paru au Japon en 2001, le virtuel était moins présent que maintenant) et sur l'être / le paraître.

 

« On souffre tous de solitude. Dans la vraie vie, on arrive pas à faire comprendre aux autres qui on est, et nous-même, on ne sait plus très bien qui on est réellement, pas étonnant qu'on se sente seul. On a besoin de liens affectifs. » (Ritsuko, alias Kazumi virtuelle, page 128).

« Si certains parents et enfants s'entendent bien grâce à leurs affinités, d'autres ont des caractères incompatibles, et ces liens de sang étouffants peuvent devenir maléfiques. » (page 140).

« On jouait la comédie. C'est ça qui était amusant. » (page 169).

 

À noter que l'inspectrice Chikako Ishizu, présente dans Crossfire, retrouve le terrain sur cette double enquête après avoir été mise au placard.

 

J'ai été entraînée, là où Miyuki Miyabe le voulait : sur une fausse piste, et puis l'écheveau s'est déroulée minutieusement et j'ai été emballée, mais je peux comprendre que d'autres lecteurs aimeront de l'action et des rebondissements. Une romancière qui mérite bien son surnom de « reine du crime japonaise », à suivre donc (j'avais lu le recueil de nouvelles, La librairie Tanabe, à sa parution et j'en garde un bon souvenir quoique vague).

 

Une lecture pour les Écrivains japonais que je mets aussi dans les challenges Des livres et des îles (Honshû, Japon), Petit Bac 2013 (catégorie Partie du corps humain pour le sang) et Thrillers et polars.

 

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25 juin 2013 2 25 /06 /juin /2013 00:05

Le faste des morts est un recueil de nouvelles de Kenzaburô Ôé paru aux éditions Gallimard dans la collection Du monde entier en novembre 2005 (175 pages, 15 €, ISBN 2-07-077619-0). Ces nouvelles sont traduites du japonais par Ryôji Nakamura et René de Ceccatty.

 

Plutôt que de récrire une biographie de Kenzaburô Ôé, je préfère vous renvoyer vers l'article qui je lui ai consacré suite au Salon du livre de Paris 2012.

 

Quoi de mieux pour découvrir un auteur que de plonger dans ses premières œuvres et de suivre son évolution ? Les trois nouvelles de ce recueil font en effet partie de la première période littéraire de Kenzaburô Ôé.

 

Le faste des morts (死者の奢り Shisha no ogori), nouvelle parue en août 1957 a lancé la carrière de l'auteur.

Le narrateur, un étudiant en littérature française, et une étudiante en littérature anglaise, descendent pour la première fois à la morgue de l'université de médecine. « Une fois la porte ouverte, une lumière semblable aux lueurs de l'aurore et un air chargé d'épais relents d'alcool nous envahirent. Au fond de ce remugle, gisait une odeur encore plus âcre, une odeur tenace et pénétrante. » (page 12). Ils ont tous deux répondu à une petite annonce pour un « travail de manutention de cadavres destinés à la dissection » (pages 16-17). Effectivement des corps flottent dans une solution alcoolisée laiteuse et servent aux étudiants en médecine mais certains sont là depuis des années et sont inutilisables... « Le travail était d'une extrême simplicité, mais il fallut beaucoup de temps pour traiter un cadavre. Il n'était toutefois pas nécessaire de nous concentrer constamment, ce à quoi je m'habituai peu à peu. » (page 23). Que veut dire l'auteur avec ce récit ? Que l'on est prêt à faire n'importe quel travail pour un peu d'argent ? Que l'on s'habitue à tout même au pire ? Que le travail est une violence ? « J'avais pénétré le monde des morts. Puis quand j'étais retourné chez les vivants, tout était devenu compliqué » (page 31). J'ai lu cette nouvelle de façon distraite... L'auteur écrit très bien, oui, ou du moins c'est bien traduit, mais je n'ai pas ressenti la petite étincelle qui m'aurait permis d'accrocher. Pourtant, en fin de livre, les traducteurs parlent, au sujet de cette nouvelle, de « maîtrise surprenante » et de « véritable vision du monde »...

 

Le ramier ( Hato), nouvelle parue en mars 1958.

Le narrateur a 14 ans et il vit dans une maison de redressement. Il ne donne pas son nom et ne dit pas pourquoi il est là. Il raconte les éducateurs brutaux et les ados plus âgés, comme le Marin, qui abusent sexuellement des garçons plus jeunes. Le directeur de l'établissement a un fils adoptif métis, blanc aux yeux bleus, et les ados l'épient jouant avec sa chienne grâce à un trou dans le mur. Un soir, ils surprennent la chienne avec un chien. « À travers les nuées pâles, le soleil couchant envoyait des rayons vifs qui formaient des ombres violacées : dans cette profusion de lumière, la chienne en haletant entretenait le plaisir du mâle en ne s'appuyant que sur ses fines pattes avant. Nous regardions les mouvements énergiques du mâle en riant. » (page 69). Lorsqu'un éducateur tue le chien et le balance dans la décharge polluée de l'autre côté, les jeunes délinquants se mettent à tuer et à pendre au mur tous les animaux qu'ils attrapent, la chienne, des rats, des taupes, des oiseaux, des lézards, des insectes, etc. Mais le fils du directeur, inconsolable après la mort de sa chienne, fait de même et tue le ramier du gardien. Toute cette cruauté envers les animaux m'a estomaquée ! Et le directeur et les éducateurs, si prompts à la punition, laissent faire ça ! La violence entre ces jeunes et les tueries d'animaux. Ils sont enfermés, mais ne sont pas éduqués ; ils sont surveillés et punis mais en fait livrés à eux mêmes et à leurs pires pulsions. Quelle vie pour l'enfant constamment violé par le Marin et que devient-il lorsqu'il est évincé au profit d'un autre : comment, après une telle humiliation physique et psychologique, peut-il se construire et avoir une vie adulte épanouie ? Le ramier est difficile à lire, j'ai du m'accrocher.

 

Seventeen (セヴンティーン), nouvelle parue en janvier 1961.

Aujourd'hui le narrateur a 17 ans, seventeen (on voit la place de l'anglais dans le quotidien japonais des années 50 et 60), mais sa famille a oublié son anniversaire et il en est frustré. Pour se consoler, il se masturbe : il le fait de plus en plus souvent depuis qu'il a compris que ce n'était pas mauvais pour la santé. Le soir, lors d'une discussion politique, l'adolescent (qui se dit de gauche) se dispute avec sa sœur qui travaille comme infirmière dans un hôpital des Forces de défense américaines. « Moi, je lui dis merde à la prospérité actuelle du Japon. Je dis merde aux Japonais qui élisent le parti des conservateurs. Tout ça, c'est dégoûtant ! » (page 113). Puis dans un accès de colère, il la frappe et la blesse gravement à un œil mais il n'est pas fier de lui. « Je suis dégueulasse et obsédé du sexe. » (page 133). Personne ne dit rien, ni le père qui lit son journal, ni la mère qui reste à la cuisine, ni le grand frère trop occupé par son travail à la banque. Le lendemain, après une épreuve de sport, un copain de classe surnommé Shin-Tôhô lui demande de travailler à ses côtés pour un meeting de la droite. Seventeen accepte parce que « La compagnie d'un ami pour lequel on n'a que du mépris est plus rassurante que la solitude, dans la mesure où l'orgueil n'est pas blessé. » (page 147). Et il se lance à fond dans l'aventure car il ne se sent plus « misérable », « ce seventeen solitaire, pitoyable, maladroit », il a « pris conscience de cette nouvelle nature », celle qui fait de lui un adulte indépendant... Un homme respectable ? J'ai mis gauche et droite en italique comme dans la nouvelle : je crois que ces termes ne sont pas utilisés au Japon, les partis principaux sont les démocrates (considérés comme la gauche) et les conservateurs (considérés comme la droite) mais il y a de nombreux autres partis comme ceux considérés plus à gauche (socialistes, populistes), au centre (progressistes, néo-libéraux) ou plus à droite (nationalistes). Pour en revenir au seventeen de la nouvelle, l'adolescent n'a pas les idées bien en place, il ne réfléchit pas vraiment, il est amer, complexé, frustré et saute d'un extrême à l'autre car il est malléable, influençable. Dans la notice en fin de livre, les traducteurs expliquent que l'auteur a écrit cette nouvelle en écho aux manifestations du printemps 1960 durant lesquelles le chef du parti socialiste a été assassiné par un militant d'extrême droite de 17 ans.

 

Avec ces trois nouvelles, Kenzaburô Ôé montre que la jeunesse est importante : dans Le ramier, les adolescents ont l'âge d'être collégiens, dans Seventeen, le personnage principal est lycéen, et dans Le faste des morts, les deux « travailleurs » d'une journée sont étudiants. Or ils sont tous confrontés à des situations extrêmes voire très violentes. Cette jeunesse doit être correctement formée, pas seulement l'enseignement et la discipline, mais quelque chose dans leur pensée, leur âme, (Quoi ? Comment ?) sans pour cela qu'elle doive subir un endoctrinement quel qu'il soit. Pas facile donc de former cette jeunesse et d'en faire des adultes sereins, heureux et responsables.

Je vais lire d'autres livres de Kenzaburô Ôé, mais pas tout de suite !

 

Une lecture pour le challenge Écrivains japonais que je mets aussi dans le Cercle de lecture de Tête de Litote (la ronde de juin concerne les nouvelles), Des livres et des îles (Shikoku, Japon), Je lis des nouvelles et des novellas et Un classique par mois (deux des trois nouvelles sont parues avant 1960).

 

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15 mai 2013 3 15 /05 /mai /2013 06:54

Kyoko est un roman de Ryû Murakami paru aux éditions Philippe Picquier en janvier 1997 (212 pages, 120 F, ISBN 2-87730-287-3). Kyoko (1995) est traduit du japonais par Corinne Atlan.

 

Ryû Murakami (son prénom complet est Ryûnosuke) est né le 19 février 1952 à Sasebo (préfecture de Nagasaki sur l'île de Kyûshû). Il a étudié le Design à l'université d'art de Musashino à Tokyo. Il est romancier, scénariste et réalisateur. Ses romans les plus connus en France sont Bleu presque transparent (1976), Les bébés de la consigne automatique (1980), 1969 (1987), Miso soup (1997) et Love & pop (2009).

 

Kyoko a 4 ans lorsque ses parents meurent dans un accident de voiture. Elle est élevée par un oncle et une tante qui s'occupent bien d'elle mais elle a toujours gardé une tristesse en elle. Tous les matins, en allant à l'école, elle passait devant les barbelés d'une base américaine et un jour, à l'âge de 8 ans, elle a rencontré José. Pendant 5 mois, il lui a appris à danser puis il est reparti à New York en lui laissant une adresse mais elle ne lui a jamais écrit. Plus tard elle est devenue chauffeur de poids lourds et a économisé de l'argent pour aller à New York. C'est maintenant, en ce mois d'avril, elle a 21 ans et elle veut revoir José. Elle rencontre Ralph, un jeune noir qui conduit la limousine de son patron.

 

L'originalité de ce roman est qu'il est polyphonique : chaque chapitre est raconté soit par Kyoko soit par les personnes qu'elle rencontre et qui sont de différentes origines, noires américaines, cubaines, dominicaines, Delaware... Il y a Ralph Biggs qui va d'abord abuser de sa naïveté pour la conduire à fort prix dans New York, Jorge Díaz qui va lui apprendre que José est d'origine cubaine, Pablo Cortés Alfonso qui va lui mentir en lui faisant croire que José est mort, Sergio Bustamante l'infirmier bénévole, etc., jusqu'à Alicia Fernando Martínez la vieille mère de José. Et puis il y a José, malade, en fin de vie, qui a perdu la mémoire et qui croit qu'il était un grand danseur et que Kyoko est une fan.

 

« […] je me rappelle bien le José que j'ai connu petite, mais le José d'aujourd'hui, je ne sais rien de lui, je n'ai pas le sentiment de sa réalité. » (page 65).

« Ces petits chaussons d'enfant que je ne peux plus enfiler depuis longtemps, si usés que les lettres de mon nom ont commencé à s'effacer. Un grillage de barbelés et ces chaussons de danse : symboles de toute mon existence. » (page 72).

« Ce n'était certainement pas simple de parcourir les neuf cents miles de New York à Miami, avec un sidéen en phase terminale. Mais la volonté de Kyoko était inébranlable. » (page 92).

« Le futur, c'est perdre ce qu'on possède maintenant, et voir naître quelque chose qu'on en possède pas encore. » (page 135).

 

Je me rappelle avoir lu Les bébés de la consigne automatique à sa parution en France (1996) mais je n'en garde pas un souvenir impérissable et je n'avais jamais relu cet auteur. Mais c'est l'auteur du mois de mai pour le challenge Écrivains japonais d'Adalana alors j'ai été soulagée de trouver un roman qui selon l'auteur est un « roman sans drogue, sans violence et sans sexe, sur la renaissance et l'espoir. » (4e de couverture). Bon, il y a quand même la violence de la maladie (le sida) et des réactions des gens (ça se déroule en 1995) et une tentative de viol donc tout n'est pas tout rose dans ce roman.

Mais il est humain, sensible et il montre aussi la force de Kyoko qui malgré sa jeunesse est forte, et si elle est forte, c'est grâce à José et à la danse. Et puis c'est un road movie intéressant à travers les États traversés (côte Est des États-Unis, de New York à Miami) et la mentalité des gens, même si elle a évolué depuis bientôt vingt ans. À noter qu'en 2000, l'auteur a réalisé un film avec Saki Takaoka dans le rôle de Kyoko.

 

Une lecture que je mets également dans les challenges Des livres et des îles (l'auteur est de Kyûshû, Japon, et Kyoko va partir à Cuba) et Petit Bac 2013 (catégorie Prénom).

 

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24 avril 2013 3 24 /04 /avril /2013 23:23

Les deux bossus est un recueil de contes d'Osamu Dazai paru aux éditions Philippe Picquier dans la collection Contes et légendes d'Asie en octobre 1997 (191 pages, 15 €, ISBN 2-87730-344-6). Otogi-zôshi  お伽草紙 (1945) est traduit du japonais par Sylvain Chupin et illustré par Jean-Pierre Cagnat.

DAZAI Osamu 太宰 治 est né le 19 juin 1909 à Aomori (nord de l'île de Honshû) au Japon. Son vrai nom est Shuji Tsushima (津島 修治). Il est un des plus célèbres écrivains japonais du XXe siècle ; il est connu pour son style « watakushi shôsetsu » ou « shishôsetsu », style issu du naturalisme japonais (milieu naturel et réalisme) qui incorpore des éléments autobiographiques dans un récit écrit à la première personne du singulier. Il est aussi connu comme un homme aimant manier l'ironie, à la fois pessimiste et fantaisiste. Il est né dans une famille riche qui comptait déjà sept enfants mais son père était souvent absent pour ses voyages et sa mère était très malade. Après le suicide de l'écrivain Akutagawa Ryûnosuke en 1927, il abandonna ses études (littérature française) à l'Université impériale de Tokyo, sombra dans une vie de débauche et s'intéressa au marxisme. Mais, après son mariage et un accord avec sa famille, il reprit ses études et devint le grand écrivain que l'on connaît (il commença à être publié en 1935) mais rien ne lui fut épargné : addiction à un médicament contenant de la morphine, désintoxication, adultère de son épouse avec son meilleur ami, tentatives de suicide, divorce, guerre. Il mourut avec sa maîtresse le 13 juin 1948 (suicide par noyade) à Tokyo. Pour ceux qui ont le bonheur de lire le japonais, ses œuvres sont disponibles sur Aozora bunko.

Introduction

Pendant la guerre, un homme se réfugie dans l'abri antiaérien avec son épouse, leur fille de cinq ans et leur fils de deux ans. Pour calmer les angoisses de la fillette, il lui lit des contes avec un livre d'images.

Les deux bossus

« Il était une fois, il y a bien, bien longtemps » un vieillard de 70 ans qui était encore enjoué et en pleine forme malgré une énorme bosse sur la joue droite (il la considérait comme un compagnon, voire un petit-fils, à qui il pouvait parler). Il vivait sur l'île de Shikoku et était grand amateur de saké mais son épouse, taciturne, le rabrouait tout le temps à tel point qu'il devint morose et sombra dans l'alcool. Lorsqu'il faisait beau, il se promenait sur le mont Tsurugi et ramassait des branchages. « Quelle vue splendide ! » (page 14). Mais un soir, pris par la pluie, il se réfugia dans une cavité avec quelques animaux et fut témoin d'une étrange scène dans la clairière. Le lendemain, il alla raconter la scène à un autre vieillard qui lui aussi portait une énorme bosse mais à l'autre joue et qui en était fort mécontent.

Ce conte déformé par l'auteur est ici typique du tragi-comique ! Je vous laisse découvrir ce qu'il advint des deux bosses des deux vieillards !

Monsieur Urashima

Urashima Tarô vit avec sa famille dans le village de Mizunoe au nord de Kyôto. Comme il est l'aîné et donc l'héritier des biens familiaux, il est « stable et d'une courtoisie irréprochable » mais sa famille ne le comprend pas toujours. « C'est dans l'explosion de la curiosité que réside l'aventure, aussi bien finalement que dans sa maîtrise. L'un et l'autre ne vont pas sans périls. Car l'homme est marqué par les destin. » (page 43). Cependant, homme de goût, il aspire à vivre noblement sans importuner personne et ne comprend pas pourquoi les autres sont si critiques. Un jour, il est interpellé par une tortue qu'il avait sauvée : pour le remercier, elle veut lui faire visiter le légendaire Palais du Dragon et rencontrer la jolie Otohime qui joue du koto. Mais comme il refuse, la tortue se fâche : « […], vous autres, le spectacle de la vraie vie, cela vous soulève le cœur. » (page 54).

Urashima Tarô va apprendre ce qu'est la véritable noblesse d'âme et le renoncement à la sainteté. Il va dévoiler sa véritable nature. Ce conte est un peu l'équivalent japonais du mythe grec de la boîte de Pandore.

Le Mont Crépitant

Au bord du lac Kawaguchi, un des cinq lacs du Mont Fuji, un raton qui s'en est pris à une vieille femme subit les foudres d'un lapin. Mais à cause de la censure sur les livres pour la jeunesse, dans la version moderne, le raton se contente de griffer la vieille femme et les tortures que lui fait subir le lapin ne sont du coup plus du tout justifiées ! « Une vengeance doit être exécutée loyalement, car les dieux sont les alliés de la justice. » (page 111). L'auteur pense à une chose : et si le lapin était en fait une adolescente vierge, doucereuse et redoutable qui attirait le raton sur le Mont Crépitant ?

Un détournement de conte amusant et coquin qui explique bien la répulsion entre deux êtres mais qui ne m'a pas convaincue.

Le moineau à la langue coupée

C'est l'histoire d'un homme de 40 ans dans la région de Sendai qui est un bon à rien ; d'ailleurs il ne fait rien et ressemble déjà à un vieillard. Il est quand même marié, depuis 10 ans, à une femme qui a maintenant 33 ans mais il n'a pas d'enfant. « Autant dire qu'il ne remplissait aucun de ses devoirs envers la société. » (page 162). Pourtant, lorsque son épouse est dehors, un moineau, que l'homme appelle Rumi, entre dans la maison. Un jour, l'oiseau se met à parler mais la femme, en colère, lui arrache la langue et le malheureux moineau s'enfuit. Alors l'homme qui n'avait jamais rien fait de sa vie, va chaque jour dans le bois de bambous pour retrouver le moineau à la langue coupée.

Dans ce conte étrange, la personne qui a le cœur pur est récompensé même s'il a déçu sa famille, la société et son épouse.

Les otogi-zôshi 御伽草子 sont des contes issus du Japon médiéval et dont les auteurs sont inconnus (un peu comme les contes récoltés par les frères Grimm). Ces contes illustrés sont environ 350 et datent de l'époque de Muromachi (1392-1573).

Dans ce recueil, Osamu Dazai modifie les contes de deux façons. La première, c'est parce que le père de famille les raconte à sa fille de mémoire et en s'inspirant d'un album illustré (et les images n'ont peut-être rien à voir avec le conte d'origine). La deuxième, c'est que l'auteur fait des digressions (par exemple sur la tortue et son habitat dans Monsieur Urashima). Du coup, le lecteur a l'impression de lire quelque chose de différent et d'être dans la complicité de l'auteur.

L'auteur explique aussi pourquoi Momotarô n'est pas dans le recueil : « si je n'ai pas les moyens de me reporter un tant soit peu à la réalité, je suis un auteur sans imagination, incapable d'écrire ne serait-ce qu'une ligne ou un mot. Ainsi, au moment de me mettre à raconter l'histoire de Momotarô, me suis-je trouvé sans ressources, dans l'impossibilité de donner corps à ce héros absolument invincible dont je ne connais pas d'exemple. » (pages 156-157).

Une lecture pour le challenge Écrivains japonais que je mets aussi dans Animaux du monde (tortue, raton, lapin, moineau), Des contes à rendre, Des livres et des îles (Honshu et Shikoku Japon), Fant'classique, Je lis des nouvelles et des novellas (qui incluent les contes) Lire sous la contrainte et Petit Bac 2013 (chiffre/nombre), Tour du monde en 8 ans, Un classique par mois.

 

 

 

 

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25 mars 2013 1 25 /03 /mars /2013 13:25

Annulaire.jpgL'annulaire est un roman de Yôko Ogawa paru aux éditions Actes Sud en juin 1999 (95 pages, 10,70 €, ISBN 978-2-7427-2291-4). Il est depuis paru dans la collection Babel (poche, n° 442), en juin 2005 (96 pages, 5,60 €, ISBN 978-2-7427-5628-5). Kusuriyubi no hyôhon 薬指の標本 (1994) est traduit du japonais par Rose-Marie Makino.


Yôko Ogawa est née le 30 mars 1962 à Okayama (Japon). Elle est diplômée de Waseda (une université prestigieuse à Tôkyô). Elle est auteur de nouvelles et de romans (assez courts) traduits dans de nombreuses langues. J'ai lu quelques-uns de ses romans dans les années 90-début 2000 et il faudrait que je les relise pour en parler sur le blog. C'était ce que j'avais fait pour La grossesse en août 2010. Tout récemment (le 13 mars) est paru son nouveau roman, Le petit joueur d'échecs, toujours chez Actes Sud, avec une superbe couverture représentant un éléphanteau devant un jeu d'échecs.

 

Que signifie le titre 薬指の標本 ?

薬指 kusuriyubi signifie annulaire ( yubi signifie doigt)

no est la particule de possession, d'attribution

標本 hyôhon signifie spécimen.

Ainsi le titre français est moins précis que le titre original mais cependant correct.

 

Un village en bord de mer. La narratrice, 20 ans, travaille dans une usine de fabrication de boissons rafraîchissantes lorsqu'elle est victime d'un accident : son annulaire gauche s'est coincé dans une machine qui lui en a enlevé un petit morceau. Ce n'est pas grand chose mais elle ne peut plus travailler là.

Elle quitte son village pour la première fois de sa vie et arrive en ville. Elle travaille maintenant depuis un an comme secrétaire dans un laboratoire de spécimens avec M. Deshimaru. Ce laboratoire est dans un ancien pensionnat pour jeunes filles et deux vieilles dames y vivent encore, celle du 223 et celle du 309.

« […] le sens de ces spécimens est d'enfermer, séparer et achever. Personne n'apporte d'objets pour s'en souvenir encore et encore avec nostalgie. » (page 23).

Un soir, M. Deshimaru invite la narratrice dans la salle de bain désaffectée et lui offre une belle paire de chaussures. Leur relation change alors.

« Nous étions restés tellement longtemps sans bouger que j'avais l'impression d'avoir été transformée en un spécimen incorporé à lui. » (page 50).

Le travail est agréable mais la narratrice n'a pas le droit d'aller au labo et dans certaines salles. Plus les jours passent, plus le mystère l'obsède et plus elle pense à son bout de doigt.

« Il m'est arrivé, alors que j'attendais les clients seule à la réception, de me retrouver sur le point d'être aspirée par le tourbillon de calme. » (page 85).

 

Toujours beaucoup de mystères et de non-dits dans les récits de Yôko Ogawa. Quel village ? Quelle ville ? Les noms de la narratrice et des deux vieilles dames ? Des infos sur la narratrice ou M. Deshimaru ? Tiens, lui, on connaît son nom mais rien de plus, à part le fait qu'il fait bien son travail et manipule ses assistantes... Ainsi, aux yeux du lecteur, la narratrice qui n'a pas de nom est encore plus soumise à ce cher monsieur qui prend possession d'elle, en commençant par ses pieds (objets érotiques).

Les jours passent, les saisons passent, et que fait la narratrice ? Elle travaille et c'est tout ! C'est-à-dire qu'en dehors du laboratoire (le laboratoire proprement dit est un lieu sacré où elle n'a pas le droit d'entrer) et de sa relation avec son patron, il n'y a rien, elle n'est rien. C'est inquiétant et ça ne m'étonne pas qu'elle se laisse manipuler par cet homme qui la fascine et développe une obsession qui la conduira à sa perte.

J'ai déjà lu des romans de Yôko Ogawa et j'apprécie son style (fluide) et ses histoires (déconcertantes) mais celui-ci m'a un peu laissée sur ma faim... Trop court. Ou alors je m'attendais à la chute et je n'ai pas été assez surprise. Il reste bien sûr un excellent roman de Yôko Ogawa, idéal pour découvrir son univers ou pour s'y plonger encore plus.

L'annulaire a été adapté au cinéma en 2005 par Diane Bertrand mais ce film éponyme a été tourné avec des acteurs français et l'actrice ukrainienne, Olga Kurylenko. De plus il s'éloigne du texte original (ce qui ne m'étonne pas, le respect de l'œuvre n'étant pas toujours une priorité...).

 

Une lecture pour les challenges Bookineurs en couleurs (couverture bleue), Cent pages, Des livres et des îles, Écrivains japonais, Je lis des nouvelles et des novellas, Petit Bac 2013 (catégorie Partie du corps humain) et Sur les pages du Japon (quartier libre pour le dernier mois).

BookineursCouleursLiyah DefiCentPages DesLivresEtIles
EcrivainsJaponais NouvellesChallenge1 PetitBac2013

 

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